Déchet

De Cinémancie
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Question d’actualité, le déchet est une vaste question. Usuellement, un déchet (détritus, ordure, résidu, ) désigne : la quantité perdue dans l'usage d'un produit, ce qui en reste après son utilisation. [1] En France, juridiquement : « Est un déchet toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire. »[2]

Erin Brockovich .
Erin Brockovich. Une petite fille malade de la pollution et des déchets toxiques infiltrés dans le sol.

Question taille, le déchet peut être d’une petite taille, un mégot de cigarette (The Pledge), des photographies (Into the Wild), des épluchures (Le Miroir, Viridiana). Il peut être d’une grande taille, des épaves de voitures ou encore une maison abandonnée (Pays de Violence). Il peut être microscopique et mortelle (Erin Brockovich). Enfin, il peut être illimité et dangereux, il peut concerner le territoire d'un pays (Stalker, la « Zone »).

Ce qui est remarquable et qu’il faut souligner, c’est quand on analyse un film sous l’angle des déchets, nous obtenons une nouvelle interprétation inédite, que l’on attendait pas.


Autres titres de films

Titre Titre original Réalisation Scénario Année Pays Durée
Avocat (L')

§. Tout juste reçu au barreau, Léo est d’ores et déjà un avocat destiné à un grand avenir. (Lire la suite : [3]) (Pitch du film.)

§. Léo aura affaire a une organisation qui dissimule des déchets.
Avocat (L') Anger Cédric Anger Cédric 2011 France 102
Erin Brockovich, seule contre tous

§. Mère élevant seule ses trois enfants, Erin Brockovich n'avait vraiment pas besoin d'un accident de voiture. (Lire la suite : [4]) (Pitch du film.)

§. En classant des documents, Erin déterre une affaire louche d'empoisonnement et décide de se jeter dans la bataille.
Erin Brockovich Soderbergh Steven Grant Susannah 2011 USA 131
Into the Wild Into the Wild Penn Sean Sean Penn,
roman de Jon Krakauer
2007 USA 147
Matrix Matrix Wachowski Andy et Larry Wachowski Andy et Larry 1999 USA 135
Miroir (Le) Zerkalo Tarkovski Andreï Tarkovski A.

Micharine A.

Et poèmes d'Arseni Tarkovski.
1975 URSS 106
Pays de la Violence (Le) I walk the Line Frankenheimer John Sargent Alvin, d’après la nouvelle de Jones Madison 1970 USA 97
Pledge (The)

§. 0h 40’ 35’’ - Jerry chez Stan Prolack (Inspecteur de police)
Le mégot dans les épluchures d'orange.

Pledge (The) Penn Sean Kromolowski Jerzy, Olson-Kromolowski Mary 2001 USA 124
Stalker Stalker Tarkovski Andreï Tarkovski A.
Strougatski A. et B.
1979 URSS 161
Virgin Suicides
§. Dans une ville américaine tranquille et puritaine des années soixante-dix, Cecilia Lisbon, treize ans, tente de se suicider. (Lire la suite : [5]) (Pitch du film.)
Virgin Suicides (The) Coppola Sofia Coppola Sofia, d'après le roman d'Eugenides Jeffrey 2000 USA 96
Viridiana Viridiana Buñuel Luis Buñuel L.
Alejandro J.
1961 Mexique
Espagne
90


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Photogrammes extraits des films - Analyse et liens spécifiques du film

Into the Wild, de Sean Penn

Les diplômes - Emory University, Atlanta - 2 ans avant le « Magic Bus »

Résumé du chapitre
«  Je n'hésiterai jamais à le déclarer,

le diplôme est l'ennemi mortel de la culture. »

Paul Valéry
  • Plan 173. 0h 12' 03"  : Flashback. C'est une journée festive de remise de diplômes. Nous rencontrons les parents de Christopher  ;
  • Photogramme 9 – Plan 193. 0h 12' 47"  : Quand le maître de cérémonie annonce : Christopher Johnson McCandless, nous entendons d'abord, le bruit de pas précipités, puis le public est ébahit de voir une personne qui saute littéralement sur l’estrade en bois et qui avance d’un pas décidé et déterminé, avec aplomb  ;
  • Photogramme 10 – Plan 196. 0h 12' 57"  : Mme McCandless, interloquée, se lève, parmi toute la foule assise, et prend une photo de son fils. C’est, hélas, la dernière photo qu’elle aura prise de son fils  ;
  • Photogramme 11 – Plan 209. 0h 13' 42"  : C'est la fin de remise de diplômes. Les jeunes diplômés lancent leur chapeaux (graduation hat) dans le ciel  ;
  • Plan 209. 0h 13' 42"  : En voix-off, la version de Christopher sur ses parents : « Je les vois devant l’entrée d’honneur de leur fac à eux. Je vois mon père passer sous l’arche de Grey Oak... » Lire le texte.
  • Photogramme 14 – Plan 226. 0h 14' 34"  : Au restaurant, Christopher et sa famille fêtent son diplôme – La situation se dégrade à cause de la Datsun jaune, les parents voulaient offrir une nouvelle voiture, à la place « de ce tas de ferrailles » - Dispute - Le père conclut : « Il faut toujours que tu fasses des histoires. »  ;

Les parents dans la poubelle

 
Photogramme - Plan 321 : Into The Wild . Il sort de son portefeuille une photographie de ses parents, il la regarde quelques secondes.

 
Photogramme - Plan 323 : Into The Wild . Et sans état d’âme, il la jette dans la poubelle.

 
Photogramme - Plan 325 : Into The Wild . Par contre, il commence à découper systématiquement et avec un geste précis, son permis de conduire, sa carte d’étudiant, et autres cartes.

Les dernières paroles du père sont prophétiques, on les appellent également un clédon. Il faut être attentif aux paroles des personnes, car ils cachent souvent des indices révélateurs : il est vrai que Christopher va faire « des histoires », qui seront à la fois merveilleuses et terribles. C'est le premier clédon dans le film, il y en aura d'autres.

  • Après les adieux à la famille.
  • Photogramme 15 – Plan 312. 0h 18' 37"  : Christopher range ses livres  ;
  • Photogramme – Plan 321. 0h 19' 04"  : Il sort de son portefeuille une photographie de ses parents, il la regarde quelques secondes ;
  • Photogramme – Plan 323. 0h 19' 08"  : Et sans état d’âme, il jette la photographie dans la poubelle. La photographie des parents devient un déchet, un résidu indésirable qu'il va supprimer d'un trait  ;
  • Photogramme – Plan 325. 0h 19' 23"  : Christopher commence à découper systématiquement et avec un geste précis, son permis de conduire, sa carte d’étudiant, et autres cartes  ;

Chapitre 1. « Ma Nouvelle Naissance »

La Datsun jaune est engloutie

 
Photogramme - Plan 353 : Into The Wild . Résigné et déterminé, Christopher va continuer à poursuivre son plan, après avoir dévissé la plaque d’immatriculation de sa voiture, il va entreprendre un geste inouïe et très rare dans notre société : brûler de l'argent.


« Chaque voyage est le rêve

d'une nouvelle naissance.  »

Jean Royer
  • Plan 340. 0h 20' 14"  : Dans sa Datsun Jaune, Christopher quitte Atlanta et roule vers l’ouest : « The west is the best. »  ;
  • Photogramme – Plan 353. 0h 21' 22"  : Christopher va continuer à poursuivre son plan, après avoir dévissé la plaque d’immatriculation de sa voiture, il va entreprendre un geste inouïe et très rare dans notre société : brûler de l'argent ;
  • Il quittera sa Datsun jaune, car elle sera littéralement engloutie par une énorme vague d'eau ;
  • Ainsi, pour sa nouvelle naissance, il ne sortira pas du ventre de sa mère, mais de la carcasse ( « tas de ferrailles » ) de sa voiture. L’eau de la vague remplaçant le liquide placentaire, c’est une espèce de fécondation par la seconde mère de Christopher : la mère nature.

Le rouge à lèvres entamé dans la poubelle

 
altPhotogramme - Plan 369 : Into The Wild . Christopher est dans une station service, il a les cheveux mouillés, il est rasé, il décide : « Il me faut un nom. » Il fouille dans une poubelle, et trouve un tube de rouge à lèvres entamé. Photogramme - Plan 369 : Into The Wild . Christopher est dans une station service, il a les cheveux mouillés, il est rasé, il décide : « Il me faut un nom. » Il fouille dans une poubelle, et trouve un tube de rouge à lèvres entamé.

 
Photogramme - Plan 371 : Into The Wild .. Muni du rouge à lèvres, Christopher écrit sur toute la largeur du miroir : « Alexander Supertramp, July 1990. »
  • Photogramme – Plan 369. 0h 22' 23"  : Christopher est dans une station service, il a les cheveux mouillés, il est rasé, il décide : « Il me faut un nom. » Il fouille dans une poubelle, et trouve un tube de rouge à lèvres entamé ;
  • Photogramme – Plan 371. 0h 22' 27"  : Muni du rouge à lèvres, Christopher écrit sur toute la largeur du miroir : « Alexander Supertramp, July 1990. » ;
  • L'image est extraordinaire, elle mérite qu'on s'y arrête. Tout d'abord, le choix du support est pertinent : un miroir, à travers lequel nous distinguons le double virtuel de Christopher. Il aurait pu choisir un mur à l'extérieur, un tronc d'arbre, un support qui ne sera pas effacé dans la journée. Il nous semble que par son choix, Christopher affirme l'aspect éphémère de son « plan ». La question qui se pose est celle de savoir où se trouve Christopher, par rapport à son double : Alexander, est-ce qu'il est de l'autre côté du miroir ? Ou devant le miroir ? Ensuite, son geste d'écriture rejoint, non seulement le panneau de son « credo », mais aussi le générique du film, ainsi, nous constatons le « poids des mots » qui commence à prendre une épaisseur significative pour devenir une part active du film, et terminer en instrument de mort. Enfin, dans la prolongation des mots, il reste la couleur rouge, qui n'est pas innocente, et qui semble être en relation avec la fin tragique de l'élan.

Les boulettes dans la poubelle

  • Au cours de son séjour en Alaska, nous constaterons qu'il consacre un temps considérable à la recherche de nourriture, aliment indispensable pour son corps, or Christopher recherchait surtout une nourriture spirituelle. Nous pensons qu'il voulait commencer à écrire son « livre ». Plusieurs indices semblent le démontrer. D'abord, à deux reprises, nous le verrons jeté, une boulette de papier dans une poubelle (plans 552 et 1070), et à deux reprises la boulette manque la poubelle et tombe à côté. En principe, nous jetons une boulette de papier dans une poubelle parce qu'elle est inutile, parce qu'elle nous ne satisfait plus. Ensuite, il écrivait souvent sur son petit carnet des mots numérotés. Il nous semble que ces mots, en majuscules, étaient des chapitres de son futur livre. Enfin, le seul livre qu'il aura écrit (dans le film), ce sont les dessins gravés sur sa ceinture, qui raconte linéairement, son voyage où « l'essentiel ce n'est pas d'aller loin, mais le chemin d'y arriver. »
  • Il reste enfin, les clédons, les paroles prophétiques, de la poubelle, (plans 323, 369 et les boulettes de papier dans la poubelle



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Miroir (Le), d'Andreï Tarkovski

Coq au cou tranché et lait débordé

 
Photogramme - Plan 145: Le Miroir.Le lait tombe goutte à goutte sur les pommes de terre avec leurs épluchures.

Plan 143  : 1h 19' 12" : La mère et le fils sont à l'intérieur de la maison. Ils essuient leurs pieds sur la nappe, mais il y a des objets qui tombent d'elle. Panoramique au sol. Maroussia ramasse des bijoux ; à côté, les pieds nus d'Aliocha tachés de boue. Les deux dames entrent dans une chambre voisine. Ignat est seul.

Plan 145 : 1h 20' 18" : Aliocha s'assied sur les bords d'une chaise. Près de lui, sur une table, il suit du regard du lait qui tombe goutte à goutte sur des pommes de terre avec leurs épluchures.(Cf. Photogramme – Plan 145. )


Les mouvements oscillatoires droite, gauche, à l'endroit et à l'envers, contrastent avec les mouvements verticaux de chute du haut vers le bas : les bijoux et les gouttes de lait sur les épluchures, des déchets. De plus, ces contrastes s'acheminent et s'enfoncent verticalement, si l'on ose dire, dans la profondeur du film. À travers les objets du film et leurs représentations, nous constatons que les données significatives ne sont pas très favorables. Ce qui en fin de compte exprime directement la pénible situation pendant et après la seconde Guerre Mondiale. D'autre part, la répétition dans cet épisode de mouvements verticaux de chute est aussi une façon d'attirer l'attention sur ces mouvements particuliers : le premier, les bijoux, avec une chute rapide ; le second, les gouttes de lait, avec une chute lente. Ce sont des indices et des exemples de liaisons qui se forment entre cet épisode et le second épisode ("Le feu au fenil"). Ces mouvements ne correspondent-ils pas à la chute conjuguée de Maroussia et de l'inconnu-médecin (le passant), à la rupture de la clôture ? Rappelons-nous le dialogue des personnes avant la chute, au second épisode (plan 9).

Il y a là d'abord une première allusion à un anneau, à une alliance, à un objet de valeur qui scelle le sort de deux êtres. Du reste, il y a la position centrale d'Aliocha quand il s'assied. A sa gauche, le miroir ovale, qui reflète son image ; à sa droite, le lait qui coule goutte à goutte, reflète un aspect de sa mère. Le lait tombe d'une certaine hauteur, il atterrit d'abord sur une table sur laquelle sont disposées des pommes de terre et leurs épluchures, le lait qui devient une flaque et déborde sur le plancher. Ce plan rejoint sans difficultés le plan 134. Lors du second rêve d'Aliocha enfant : la mère, les pommes de terre et le chien. Il rejoint également le plan 17 : le chat noir et le lait renversé.

La confluence des indices démontre comme pour le plan 135 : "l'obscur animal", un destin obscur ou plutôt l'obscurité d'une destinée est traduite par l'écoulement du lait. Au moment de son écoulement, le lait est blanc immaculé in-corrompu. Par paliers, il se mélange aux déchets de la terre (les épluchures), pour finir enfin au sol du plancher, aux pieds de son fils, ou aux pieds des gens tout court. L'obscurité d'une destinée est traduite ensuite par les pommes de terre, ce fruit de la terre qui pousse dans l'obscurité de la terre, qui de plus est représenté dans deux moments rapprochés du film (Maroussia était dans une pièce obscure). Enfin, dernière traduction, le chat noir lapant le lait. Tous ces indices concourent à la détermination d'un statut particulier de Maroussia. Mais aussi paradoxal que cela paraisse, aussi obscure qu'elle puisse paraître, elle reste, quoi qu'on puisse dire, un fruit, un fruit délicieux qu'on appelle "maman". Car il semble que le drame de Maroussia, c'est que son second mariage ait échoué aussi.


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Pays de la Violence (Le), de John Frankenheimer

Résumé du film

0h 00’ 00’’ – Générique : Un barrage de sentiment

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme - 1. Premier plan du film. Un large fleuve qui coupe en diagonale l’image. Au fond, un barrage hydroélectrique.

Photogramme 1. Premier plan du film. 00h 00' 06" : L’ouverture du film est révélatrice, d’emblée elle présente un paysage fluvial transformé par un barrage hydroélectrique qui « bouche » le fond de l’image, qui barre le paysage d’un trait (une ligne) monumental en ciment. Face à cette contradiction, la nature s’exprime d’une manière différente : les arbres poussent dans l’eau, mais ils n’ont pas de feuilles, est-ce un paysage d’automne ? Les arbres vivent dans l’eau, mais ils ont l’air desséchés, comme l’est peut-être le shérif, en hors-champ, qui observe les alentours. Il est pensif, songeur. On l’appelle sur la ligne interne du véhicule de service. Il ne répond pas. Il entre dans le véhicule, il démarre et roule à vive allure.

Photogramme 2. 01' 03" : Aussitôt, nous nous retrouvons sur le gigantesque barrage du fond de l’image précédente. Une division en diagonale : à gauche l’eau, et à droite, les contreforts du barrage. L’image est impressionnante, elle semble suggérer, l’état provisoire des principaux protagonistes : est-ce que l’eau suggère la personnalité d’Alma qui va finir par déborder sur les contreforts, la force naturelle de Henry ?

Durant le parcours sinueux du shérif, nous allons découvrir des plans qui représentent un panorama de la population rurale de la ville, des portraits instantanés, principalement des personnes âgées assissent, qui prennent le frais, sous les toits des vérandas. Ce qui est frappant dans ces portraits, c’est un caractère dominant de stoïcisme, de résignation. En fait, les regards de ces personnes âgées est comparable à celui du shérif quand il était près de l’eau.

Photogramme 4. 02' 49" : Le réalisateur semble insister sur le côté « abandonné », « obscur » de la société, le shérif traverse une casse d’épaves de voitures alignées et rouillées.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme - 4. Le shérif traverse une casse d’épaves de voitures.

0h 03’ 40’’ – Alma et Buddy « jouent » avec une camionnette

Résumé : Le shérif se lance à la poursuite de la « camionnette ivre » de Buddy (un mineur) et de sa sœur Alma. Après l'arrêt du véhicule et la fuite de Buddy.

Le shérif sort de sa voiture de fonction et se dirige calmement, vers la camionnette, la contourne, s’approche de la porte du conducteur.

Photogramme 7. 04' 52" : Alma est tapie au fond du véhicule, elle a l’air craintive. Le shérif s’incline légèrement à l’intérieure de la camionnette et demande : « 
- Ca va ?
- Oui, shérif.
- Sortez de là.
- Bien, shérif.
- C’est qui dans les taillis ?
- Hein !
- Quelqu’un s’est échappé.
- Ça c’est Buddy. Mais c’est qu’un gamin.
(…) (Elle raconte l'incident des chaussures de crocodiles de grande taille.)
- Votre nom ?
- Alma McCain. (Cf. Photogramme - 8. 05' 55")
- Où habitez-vous ?
- Gatesboro Road. On est arrivés récemment. Avant, on était à Loomis Canyon.
- Qui ça, « on » ?
- Mon père, Buddy, Clay et moi. Clay a presque 18 ans. Mais ils sont pas à la maison, ils bossent.
- Où ça ?
- A l’usine. Mais c’est du travail quand même. Ca fait rentrer de l’argent, c’est bien. (Elle sourit. Henri est dubitatif. )
- C’est très bien (Elle sort de la camionnette.)
- Ils sont chez Kingman. Ils fabriquent des cafetières.
- Et votre mère ?
- J’en ai pas. Je fais la cuisine et je m’occupe de Buddy.
- Moi, je vous dis ce que j’ai vu : c’était un petit garçon qui conduisait. Et vous êtes pas un petit garçon à ce que je sache. (Elle rit.)
- Non, shérif. (Temps de silence prolongé.) N’arrêtez pas Buddy. Je suis responsable de lui. Il est encore petit. (Elle lui prend le chapeau de Buddy des mains. (Cf. Photogramme - 10. 07' 17") Je vous en serais vraiment reconnaissante.
- Montez. (Cf. Photogramme - 11. 05' 55")
- Dites à votre père que le shérif Tawes a dit : que les gens qui conduisent doivent avoir leur permis…
- Entendu shérif. Je vous remercie infiniment.
- Et dites aussi à votre frère de mettre des chaussures à sa taille.
- Oui shérif.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme - 8. - Henri (off) : Votre nom ?
- Alma : Alma McCain.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme - 10. Alma prend le chapeau de Buddy des mains du shérif.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme - 11. Derrière la pare-brise fêlée de la camionnette, l’impact des lignes de fêlures sur l’âme du shérif.

0h 22’ 44’’ – L’inspecteur fédéral Bascomb

Résumé : L'inspecteur est en mission. Il exige du Shérif d'établir la liste de tous les contrevenants qui distillent illégalement de l'alcool. Le père d'Alma McCain est concerné par cette enquête. Le Shérif va passer sous silence le délit.

0h 28’ 53’’ – La page arrachée du registre

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 43 La main du shérif qui compose la combinaison du coffre de la police pour sortir un grand registre. Est-ce le registre des arrivées dans la comté, comme l’a prétendu Alma ?


Photogramme 43. 28' 53" : Gros plan de la main du shérif qui ouvre un coffre métallique en faisant tourner le code d'une combinaison. Il sort un grand livre du genre registre. Il s’installe à son bureau et commence à consulter le registre. Est-ce le registre des arrivées dans la comté, comme l’a prétendu Alma ?Il arrive à la page McCain. (Cf. Photogramme - 44. 29' 21") Il boit un verre de whisky. Il déchire la page.(Cf. Photogramme - 45. 29' 38")

29' 43" : Au même moment, en face du commissariat, Hunnicutt est en civile dans une salle de jeux où l’on joue au billard, il mange des pop-corn. Mais d’une nature fouineuse, Hunnicutt monte de la cave de la salle de jeux, pour observer le shérif qui est encore dans son bureau. Il continue à manger ses pop-corn pour voir que le shérif sort de son bureau, monte dans sa voiture, et part.


 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 44. Le shérif consulte le registre et trouve la page des McCain, la page qui représente Alma.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 45. Le shérif vide un verre de whisky et sépare la page des McCain en la déchirant.

0h 49’ 32’’ – Cinquième rencontre – La maison abandonnée

L'histoire du shérif – Les piles

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 66. Le shérif invite Alma à entrer dans une maison abandonnée. La maison de son enfance.

Des images d'une maison abandonnée défilent. Le shérif tenant la main d'Alma entre dans la maison. (Cf. Photogramme - 66. 50' 17") Alma visite la maison complètement délabrée. Le shérif la suit et chuchote : « Des fantômes. (Cf. Photogramme - 67. 51' 00")
- Hum !
- Des fantômes. (Alma rigole.) J'ai toujours cru qu'il y en avait, ici. (Il tient Alma par la taille.) On entendait plein de trucs.
- Qui ça, “on” ?
- Avec mes sœurs.
- Vous entendiez quoi ?
- Des bruits.
- Elles sont mortes, maintenant... Il y a 16 ans. Leur voiture a été heurtée sur l'autoroute. Ma mère et mes sœurs. Mon père s'en est toujours pas remis.
- Tu vas à l'église ? (Il la regarde d'une manière dubitative.) Le fait que tu sois shérif... (Le shérif lui sourit, et l'enlace tendrement, longtemps.) (Cf. Photogramme - 68. 51' 52") Je suis désolée pour ta famille. (Il l'embrasse au front.)
- Tu vois le lac, là-bas ? (Elle se dirige vers la fenêtre.) C'était chez nous.
- Vous en êtes partis ?
- On nous a expulsés. (Tout à coup, le shérif fouille dans ses poches.) J'allais oublier. (Il sort de sa poche, deux piles rouges emballées. Alma est heureuse. Ils rigolent.)
- Je vais les mettre. » (Cf. Photogramme - 69. 52' 37")

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 67. Le shérif qui chuchote : « Des fantômes. »

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 68. Le shérif qui enlace Alma.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 69. Le shérif sort de sa poche les piles afin de les offrir à Alma.

La partie de cache-cache

Résumé : Une partie de cache-cache s'engage entre Alma et le Shérif.

L'escalier – Le shérif veut enlever Alma

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 74. Alma trouve enfin le shérif, assis au milieu d'un escalier.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 75. Plan moyen du shérif assis sur l'escalier; Notez au niveau de sa tête un barreau cassée de la rampe. Est-ce l'ouverture vers ce qui semble une cassure intérieure ?

Elle entre par une autre porte dans la maison, et tout à coup, elle est effrayé de voir le shérif assit sur l'escalier. (Cf. Photogramme - 74. 54' 52")

Le cadrage est d'une grande qualité.

En contre-champ, le shérif regarde Alma, silencieusement. Alma, pensant que c'était la suite du jeu de cache-cache lui dit : «  Tu m'as foutu la frousse. Tu es vraiment terrible, tu le sais ? (Le shérif ne répond pas, se contentant de la regarder.) (Cf. Photogramme - 75. 54' 55")Qu'y-a-t-il ?
- Partons ensemble, Alma.
- Hum
- Partons ensemble. (Cf. Photogramme - 76. 55' 16")
- (En souriant, comme si c'était, aussi, un jeu.) D'accord. Où veux-tu aller ? (Cf. Photogramme - 77. 55' 20")
- Où tu veux.
- Chicago.
- D'accord.
- En avion car je l'ai jamais pris.
-(Le shérif est subitement, très enthousiaste, car il pensait qu'elle disait vrai.) En avion.
- Tout ce que je pourrais ramener de Chicago...
- On ne reviendra pas.
- J'ai jamais dépassé Knoxville. Et ce n’est pas demain la veille. Mon oncle de Waco, dans le Texas, est venu nous rendre visite. Il m'a invitée, mais j'ai plus de nouvelles.
-(Le shérif s'extasie de plus en plus.) On va aller plus loin que Waco... On va aller en Californie et au Canada.
- En Californie. (Il la scrute attentivement, pour voir si elle accepte.) (Cf. Photogramme - 78. 55' 53")
- (Alma remarque que le shérif ne plaisantait pas, qu'il est très ému.) Tu est un homme bon.» (Elle lui tend la main, il la prend.) (Cf. Photogramme - 79. 56' 05")

Cut.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 76. Gros plan du shérif qui demande à Alma de partir avec lui.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 77. Alma qui considère la proposition du shérif comme un jeu. L'expression de son visage témoigne de son incrédulité, ce qui n'était pas le cas du shérif.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 78. La transformation du shérif quand Alma lui annonce qu'elle accepte de partir avec lui.

 
I walk the line de Frankenheimer John. Photogramme 79. Heureux, le shérif prend la main d'Alma.
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Stalker, d'Andreï Tarkovski

Résumé du film

Dans le film Stalker , le Stalker est un personnage clé. Il est la clé de la Zone : (…) "Un no man's land gardé par des militaires et qui contient la "Chambre des Désirs", capables d'exaucer les vœux de ceux qui y parviennent. Mais l'accès en est interdit et seul quelques guides - "les stalkers"- en connaissent le chemin. Un écrivain et un physicien, [6] demandent à un stalker de les y conduire." [7]

Les pistes de réflexions

Comme nous pouvons nous en apercevoir, il est difficile de distinguer le passage d’un objet d’une phase utilitaire à sa phase de déchet. Il s’agit de la question suivante : quand est-ce qu’un objet devient un déchet : Nous rappelons qu’en France, juridiquement : « Est un déchet toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire. »[8]

Nous allons donc mentionner les plans pertinents qui proposent des pistes de réflexion autour de la question.

Les pèlerins de la « Zone » (plans 2 – 42)

Le Professeur et le néon clignotant (plan 3)

 
Stalker, Photogramme - Plan 3. Le Professeur entre dans le bar, au-dessus de sa tête, un néon blanc ne cessera pas de clignoter.

Ne peut-on pas dire que le néon s’approche de sa fin de cycle et que bientôt il va devenir un déchet ?

*
Le Stalker : Gîte du guide (plans 5 – 14)

 
Stalker, Photogramme - Plan 6. Le plateau en fer qui vibre, en faisant déplacer le verre. En outre, nous distinguons : (…) "Un bout de coton, deux comprimés, une sorte de petite boîte, un morceau de papier froissé."

Le plateau en fer contient des déchets : le bout de coton et le morceau de papier froissé.

*
Le chapeau de l’Ecrivain sur le capot (plan 14)

 
Stalker, Photogramme - Plan 14b. L'Écrivain perd son chapeau, posé sur le toit de la voiture. Notez le poteau dans l'image qui constitue "un obstacle".

Nous l'avons compris, l'Écrivain souhaite emmener avec lui dans la Zone, la belle dame. Toutefois, le Stalker ne voit pas les choses de la même façon. Il s'approche de la dame, et lui dit des mots inaudibles à l'oreille. Elle s'en va, en lançant à l'Écrivain: "Crétin." En partant dans sa voiture, elle emporte le chapeau de l'Écrivain qui était posé sur le toit de la voiture. La scène est presque burlesque, une voiture avec un chapeau. (Cf. Photogramme – 9.)

L'Écrivain s'aperçoit que son chapeau part avec la voiture, il passe sa main sur sa tête nue. Le chapeau va s’envoler et va évoluer en un déchet.

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« L’Avant-Zone » (Plans 18 – 42 )

Plan 16b : Les trois hommes sont réuni au bar que nous avons vu au début du film. Au bout d'un moment, nous entendons un sifflet de train retentir. Le Stalker leur dit : « Vous entendez, c'est notre train. » Ils sortent du bar. Ils montent dans une jeep. (Plans 18 - 42 )

 
Stalker, Photogramme - Plan 19a. Un passage que la jeep va bientôt emprunté. Nous pouvons constater la haute qualité poétique de l’image.

 
Stalker, Photogramme - Plan 21. Une autre rue, un autre passage. Comparer avec le plan 19a : Chaque rue présente sa propre physionomie.
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« La Zone » (Plans 43 -131)

L’extérieur de la « Zone »
Les poteaux de la « Zone » - 1 -

 
Stalker, Photogramme - Plan 44a. Premier plan sur l’extérieur de la Zone.

Plans 43 - 44 : 36' 22" : L’extérieure de la Zone est un paysage brumeux, au premier plan, des herbes et des arbres, au fond, une forêt et un fleuve. (Cf. Photogramme – 21.) Parmi les rares vestiges d'une civilisation passée, nous distinguons des poteaux électriques en bois penchés de côté. La disposition particulière des deux poteaux va nous introduire de nouveau dans une dimension biblique. En effet l'image inclut et suggère, si l'on ose dire, (...) "les croix du Golgotha", "ce qui veut dire lieu des crânes." [9]

 
Stalker, Photogramme - Plan 52. Le petit bus envahit d’herbes.
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Stalker, Photogramme - Plan 55b. L’Écrivain qui monte sur l’une des caisses en travers du chemin.

 
Stalker, Photogramme - Plan 57a. Le Stalker, furieux, lance une courte barre de fer sur l’Écrivain en criant : « Non, n’y touchez pas !  »

 
Stalker, Photogramme - 38 : Plan 57b. Le Stalker prend la bouteille des mains de l’Écrivain, comme s’il voulait en boire aussi.

 
Stalker, Photogramme - Plan 58. Le Stalker s’éloigne du groupe et vide la bouteille.

 
Stalker, Photogramme - Plan 61b. En fin de plan, un objet flou, comme un voile transparent sombre, traverse l’écran de haut en bas.
Nous retrouvons la même situation dans Le Miroir, au plan 23, au réveil d'Aliocha, une serviette blanche mystérieuse, traverse le cadre de la porte.


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Travelling d’objets sous l’eau

Travelling avant et zoom en gros plan sur l’eau. Dans l’eau on distingue, une seringue (seconde fois), la terre vaseuse, des morceaux de fers rouillés.

  • Travelling (suite) : Sous les pierres, une seringue (3ème fois), une cuillère, un récipient en fer blanc à l’intérieur duquel il y a une seringue, des pièces de monnaies, la couverture d’un livre représentant une icône (Cf. Photogramme – Plan 89a.), une mitraillete, des bouts de fil barbelés, un ressort (Cf. Photogramme –Plan 89b.), des lambeaux de pages de livre, une sorte de vieille pipe et enfin, flottant sur l’eau, la main du Stalker en gros plan.


 
Stalker, Photogramme - Plan 89a. Les pièces de monnaies et la couverture d’un livre représentant une icône.

 
Stalker, Photogramme - Plan 89b. Le ressort.


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Le « Tunnel-Hachoir »

 
Stalker, Photogramme - Plan 96. Vue du large tunnel incurvé et sombre.

 
Stalker, Photogramme - Plan 108. Gros plan du revolver, la main du Stalker pousse et enfonce le revolver dans l’eau.
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La petite pièce du Bunker

 
Stalker, Photogramme - Plan 119. Du fond d’une grande pièce, s’avance le chien noir qui traverse la pièce.

Plan 120 : 1h 48' 25" : Les trois hommes sont dans une petite pièce, vus à travers l’encadrement d’une porte au centre de l’image. (…) L’Écrivain tient en main une sorte d’enchevêtrement de fils de fer…

 
Stalker, Photogramme - Plan 120b. La lampe suspendue au plafond s’éclaire avec puissance, puis s’éteint petit à petit.

L’Écrivain depuis le début continue de triturer et former un cercle avec enchevêtrement de fils de fer qu’il tient dans ses mains, tout en continuant de discuter : « C’est clair, vous voulez écraser l’humanité… par un bienfait inimaginable… (…) On rêve d’une chose et il vous en arrive une autre. »

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La couronne en fil de fer

 
Stalker, Photogramme - Plan 120c. L’Écrivain met sur sa tête l’enchevêtrement de fils de fer, qui lui fait comme une couronne d’épines.

 
Stalker, Photogramme - Plan 122. Le chien couché dans un étroit passage. Au fond, la bouteille de vin, la plante verte et les ossements d'un couple enlacé.

Plan 122 : 1h 55' 25" : Le chien est couché dans un étroit passage. Une bouteille de vin est posée à sa droite. Le fond du passage est illuminé. Nous entendons un grincement de porte et des bruits de pépiements d’oiseau. Seul un rai de lumière éclaire maintenant une plante. Grincement de porte : la lumière inonde le fond du passage. Puis à nouveau, l’obscurité. Au pied de la plante, gisent des restes d’ossements humains. (Cf. Photogramme – Plan 122.) Nous entendons le Stalker s’adresser au Professeur : Professeur, venez près de nous. On entend un bruit de pas.


« La Chambre des Désirs »

 
Stalker, Photogramme - Plan 123. Les trois hommes devant l’entrée de la « Chambre des Désirs ».
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La bombe du Professeur

 
Stalker, Photogramme - Plan 125. Le Professeur tient d’une main la bombe, l’exposant aux regards des deux hommes.

 
Stalker, Photogramme - Plan 131a. La caméra est placée dans la Chambre. Le Professeur jette une autre pièce de la bombe dans la flaque d’eau : « Alors, je n’y comprends rien. Quel sens y-a-t-il de venir ici ?  »

 
Stalker, Photogramme - Plan 132. Un poisson apparaît rôdant près de la bombe. Un fluide noir et rouge dense apparaît à gauche de l’image, il se répand dans l’eau, masquant bientôt le poisson et la bombe.
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Les prodiges de Ouistiti

 
Stalker, Photogramme - Plan 144e.  : Ouistiti se concentre à nouveau sur le verre qu’elle amène, par la force de son regard, au bord de la table au premier-plan. Puis, elle se concentre sur le bocal. Elle le fait déplacer jusqu’au milieu de la table. Ensuite, elle passe à l’autre verre qu’elle dirige aussi vers le bout de la table.
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Viridiana, de Luis Buñuel

Résumé du film : Viridiana : Un film tissé comme une toile d’araignée parfaite

La grande puissance poétique de ce film réside dans un fait rare au cinéma, c’est que Buñuel va tisser son film comme une toile d’araignée. Chaque fil de la toile correspond à un objet spécifique, entre autres : La corde à sauter de Rita, la croix et la couronne d’épines, les cendres, l’épluchure d’orange, la robe de mariée, le voile et la couronne de fleurs artificielles, etc. Le grand art du réalisateur c’est non seulement, d’avoir relier les objets entre eux, mais de mettre également au centre de la toile deux sujets tabous : l’inceste et l’iconoclasme.

Enfin, soulignons que les cendres et l'épluchure d'orange sont des déchets.

7ème chapitre : 0h 11’ 39’’ – 0h 13’ 26’’ : Plans 23 – 33. Viridiana somnambule – Les cendres sur le lit de Don Jaime

  • Photogramme - Plan 23. 0h 11' 41" : Don Jaime est étonné de voir passer près de lui Viridiana en chemise de nuit, elle porte sur les épaules un tricot de laine. La jeune femme est visiblement absente, elle a les yeux ouverts, mais le regard est sans expression. Elle tient dans ses mains une corbeille à ouvrage en osier. Don Jaime la suit du regard.

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme - Plan 23.
L'étrange apparition de Viridiana.

Plan 24 0h 11' 53" : Viridiana se dirige directement vers la cheminée du salon. Elle s'approche d'un fauteuil, elle s'assied.

  • Photogramme 29 – Plan 25. 0h 11' 41" : Au moment où Viridiana s'assied, sa chemise s'ajuste mal et laisse voir ses jambes et ses pieds nus.
  • Photogramme 30 – Plan 26. 0h 12' 09" : Les yeux de Don Jaime se fixent sur ces jambes parfaites, il n'arrive pas à détacher son regard. Il est visiblement troublé.

Cendre et bouquet de fleur sur le lit de Don Jaime
  • Photogramme – Plan 27. 0h 12' 12" : La caméra est placée en arrière du feu. Viridiana le regard toujours fixe, se lève du fauteuil, elle s'approche du feu, et commence à jeter dans le feu ce que contient la corbeille : aiguilles, pelotes, écheveaux.

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme - Plan 27.
Le regard fixe, Viridiana jette dans le feu une pelote de laine.
  • Photogramme – Plan 28. 0h 12' 29" : Plan rapproché. Viridiana s'accroupit devant le feu. Elle saisit de la cendre à pleine main pour le déposer dans la corbeille. Plan rapproché sur Don Jaime qui est de plus en plus perplexe (Plan 29).

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme - Plan 28.
Viridiana jette la cendre dans la corbeille.

Plan 29  : Plan rapproché sur Don Jaime qui est de plus en plus perplexe. Il est inquiet.

Plan 30a. 0h 12' 36" : Retour sur Viridiana qui en se levant, laisse découvrir sa cuisse. Elle se dirige lentement vers la chambre de Don Jaime.

Plan 30b.  : Plan rapproché. Viridiana se dirige vers la chambre de Don Jaime.

  • Photogramme – Plan 31a. 0h 12' 45" : Gros plan du bouquet de fleurs artificielles sur le lit, que Don Jaime a jeter il y a quelques minutes, avec un certain mépris.

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme - Plan 31a.
Gros plan du bouquet de fleurs artificielles sur le lit de Don Jaime.
  • Photogramme – Plan 31b. 0h 12' 49" : Viridiana avance près du lit, elle s’arrête et d’un geste lent, vide sa corbeille de cendre sur la couverture près des fleurs d’oranger.

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme - Plan 31b.
Viridiana vide la corbeille de cendre sur la couverture près des fleurs d'orangers.
  • Photogramme – Plan 31d. 0h 13' 03" : Viridiana sa corbeille en main, passe, en frôlant Don Jaime de dos. Elle a toujours les yeux ouverts, le regard mort. Elle sort de la chambre. Don Jaime s’approche du lit et observe épouvanté la cendre que cette dernière vient d’y laisser. Il saisit une poignée pleine de cendre.

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme - Plan 31d.
Don Jaime qui saisit la cendre, comme s'il voulait être sûre du spectacle peu ordinaire qu'il vient de voir.

Plan 32  : Viridiana se dirige vers sa chambre. Don Jaime vient jusqu’au seuil de la sienne pour voir sa nièce pénétrer chez Dona Elvira.

Plan 33  : La porte de la chambre de Dona Elvira se ferme très lentement. On entend le faible déclic de la serrure.

Quelle est la valeur de la cendre ?
*


Buñuel continue à introduire des objets et de les animer avec un grand art mais aussi de l'ambiguïté. Après la corde à sauter, les poignées de la corde, les instruments de crucifixion, le pis de vache, l'abeille et le coffre de Don Jaime, il nous présente maintenant une corbeille en osier, avec des aiguilles et pelote de laine. Ce qu'il faut souligner tout d'abord, c'est que la corbeille vient de faire sa première (et dernière) apparition ; nous n'avons rencontré personne qui tricote. Est-ce que la corbeille appartient à Ramona ? Seule femme de la maisonnée. Ou alors à Viridiana ? Cela reste un mystère, comme l'apparition mystérieuse de Viridiana à l'instant précis où Don Jaime a ouvert le coffre. En effet, il ouvre le coffre et voilà que Viridiana apparaît dans un état de somnambulisme, un état éveillé mais inconscient. Ne peut-on pas également déduire que c'est une apparition de feue Dona Elvira, étant donnée la grande ressemblance entre Viridiana et Dona Elvira ? Par ailleurs, nous pouvons constater que durant son état inconscient, Viridiana a constamment le regard fixe, en avant, comme si elle voyait au-delà des choses, comme si elle voyait le futur. Ainsi, au moment où elle remplace le contenu de la corbeille par de la cendre, elle ne regarde pas ce qu'elle fait, mais elle le fait adroitement. Il en est de même quand elle jette la cendre près de bouquet de fleurs artificielles, c'est comme si Elle savait ce qu'Elle faisait. Et la question est de savoir qui c'est Elle ? (Viridiana ou Dona Elvira ?)

Quelle est alors la valeur de ce plan unique dans le film ? Nous avons vu à quel point Don Jaime était inquiet et intrigué par la scène qui est exceptionnelle. La question reste ouverte, mais nous pensons assister au vœu de métamorphose souhaitée par Viridiana. Elle remplace des objets, encore une fois banales, par de la cendre : le produit de la fin de toute chose terrestre. D'autre part, il semblerait que la cendre « tire son symbolisme du fait qu'elle est par excellence valeur résiduelle : ce qui reste après l'extinction du feu. (Mais) Spirituellement parlant, la valeur de ce résidu est nulle. La cendre symbolisera la nullité liée à la vie humaine, du fait de sa précarité. » [10] Doit-on alors interpréter le plan 31b sous l'angle de la « nullité » ? La nullité du mariage de Don Jaime ? Un mariage artificiel à cause du bouquet de fleurs artificielles ? (Un parallélisme de plus.)

Enfin, il reste encore à développer d'une part, les équations que nous avons pointé précédemment :
[1.1] : CordePiedPoignéeSerpentPelote de laineFeuCendreLit

10ème chapitre : 0h 15’ 32’’ – 0h 16’ 52’’ : Plan 40. La fin du déjeuner – Explication sur le somnambulisme de Viridiana

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme - Plan 40a.
Viridiana qui épluche une orange.

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme - Plan 40b.
Don Jaime admiratif devant l’épluchure d’orange.
  • Photogramme – Plan 40a.   0h 15' 32" : Gros plan sur les mains de Viridiana en train de peler un fruit. L’épluchure forme en se déroulant une longue spirale. Elle pose le fruit sur une soucoupe et la porte à Don Jaime, qui est assis près de la cheminée, où un beau feu est allumé. Don Jaime est en train de nettoyer ses pipes. Il les abandonne pour remercier sa nièce de son chef-d’œuvre. Il admire la spirale : « Je n’ai jamais su faire ça, je suis très nerveux. (Cf. Photogramme – Plan 40b )

- Viridiana (Elle contemple le feu. Puis elle se rapproche de Don Jaime, l’air perplexe.) : Pourquoi ne m’avez-vous pas réveillée ?
- Don Jaime (En train de manger son fruit.) : On dit que c’est dangereux.
- Viridiana : Ne le croyez pas. Il y a quelques années, la dernière fois où je me suis promenée endormie, on m’a réveillée en me giflant. Et vous voyez je suis encore vivante ! (Soudain, son visage s’assombrit.) Ce qui me préoccupe, c’est d’avoir porté des cendres sur votre lit.
- Don Jaime : Pourquoi ? Ce n’est pas plus étrange qu’autre chose. Les somnambules ne savent pas ce qu’ils font.
- Viridiana (En secouant la tête négativement.) : Non, mon oncle. Les cendres veulent dire pénitence, et mort.
- Don Jaime : Alors, la pénitence pour toi, qui vas être nonne, et la mort pour moi, qui suis le plus vieux. (Viridiana s’est assise. Ramona qui est entrée un instant auparavant sert une tasse de café à Don Jaime.) Demain, si tu veux bien, je t’accompagnerai au village quand tu partiras.
- Viridiana : Merci, mon oncle.
- Don Jaime (Regarde la pipe qu’il est en train de bourrer.) : Ce soir, il faudra faire quelque chose de spécial en signe d’adieux.
- Viridiana : Ce que vous voudrez.
- Don Jaime (Tend à sa nièce un morceau de fruit. Elle le prend et avec un air faussement détaché.) (Cf. Photogramme 40 – Plan 40c ) : Je voudrais que tu me fasses un plaisir. Une chose innocente, mais qui me tient beaucoup à cœur.
- Viridiana : Aujourd’hui, je ne peux rien vous refuser.
- Don Jaime : Alors, tu feras ce que je te demanderai ?
- Viridiana (Sans inquiétude, mord sur le quartier de fruit que son oncle lui a donné.) : Ce que vous voudrez. Ordonnez-moi.
- Don Jaime  (Il la regarde avec gratitude. Mais aussitôt il est plein de pudeur.) : Non, attends… (Il sourit gauchement.) Quelle sottise ! Cela me coûte beaucoup de te le dire.  » (Il prend une gorgée de café, rallume sa pipe. Il hoche la tête comme s’il avait pitié de lui-même.)

Est-ce que le morceau d’orange est une allusion au fruit défendu ? Au corps de Viridiana ?

 
Viridiana de Luis Buñuel. Photogramme 39 (bis) - Plan 40b. Détail
Un agrandissement de l’épluchure d’orange.

Reprenons dès le début, c’est Viridiana qui épluche le fruit et qui l’apporte sur une soucoupe, pour l’offrir à Don Jaime. C’est métaphoriquement, comme si elle s’offrait, inconsciemment à Don Jaime. Il en est de même quand Don Jaime contemple la spirale de l’épluchure, il admire la dextérité de Viridiana à découper la « peau » du fruit avec précision, mais ne peut-on pas dire qu’il contemple le « corps » de Viridiana ? « Un corps parfait qui se déroule devant lui », et qu’il tient par la main. Un corps qui est à la portée de sa main, et ça va être le cas. D’ailleurs, si l’on observe attentivement le photogramme du plan 40b, détail, nous constatons une similitude schématique frappante, (un parallélisme de plus, doublée d’une résonance), entre le corps de Viridiana et l’épluchure. En effet, l’amorce de l’épluchure qui est ronde, correspond à la tête et le reste de la spirale au corps. De plus, l’image montre Viridiana de dos, en face du feu de la cheminée. Le feu de sa détermination qui va hélas, indirectement céder.

Mais ne peut-on pas également déduire que la forme générale de l’épluchure, telle qu’elle est représentée dans le plan 39, devient une métaphore globale du « fruit défendu » ? Ne devient-elle pas ainsi, à la fois, l’arbre, le serpent et le fruit ? Nous assistons alors, à une intense condensation (concentration) et une inversion de la scène biblique de l’histoire d’Adam et d’Eve, puisque c’est Don Jaime qui donne un morceau du fruit à Viridiana. [11]

La relation de l’épluchure avec les cendres

Il reste enfin un autre point important que nous risquons de passer sous silence, car très souvent, nous n’établissons pas de lien entre les plans, nous avons tendance à les traiter séparément, sans chercher les relations et les combinaisons qui peuvent s’établir entre eux, nous avons déjà parler de ces aspects. Ainsi, en ce qui concerne la scène de l’épluchure, il est important de se rappeler ce qui s’est passé dans les plans précédents et qui sont en étroite relation avec celui-ci, et c’est d’ailleurs ce qui préoccupe Viridiana. Il s’agit des plans 23 – 33, les cendres sur le lit de Don Jaime. Nous retrouvons alors un autre parallélisme :
[Parallélisme 4]  : Viridiana vide la corbeille de cendre sur la couverture près des fleurs d’oranger (0h 12' 49") / Viridiana pose l’épluchure et l’orange sur une soucoupe et la porte à Don Jaime (0h 15' 32")

Ce qui est pertinent dans ce parallélisme et qui offre un dénominateur commun, c’est que les cendres et l’épluchure sont des « restes », pour ne pas dire des déchets ; le premier c’est ce qui reste d’une combustion, le second c’est l’enveloppe, la peau, à retirer pour accéder au fruit. Or, dans les deux cas, c’est Viridiana qui apporte les restes à Don Jaime.

A présent observons la descente de Don Jaime dans une spirale dangereuse.

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Notes et références

  1. Source : Wikipédia.
  2. Code de l'environnement. Site ineris.fr
  3. Les clients les plus prestigieux ne manquent pas de faire appel à son talent inné pour le droit des affaires. Mais les apparences sont trompeuses, et Léo découvre bientôt derrière les entreprises qu’il défend les tentacules d’une organisation mafieuse.
  4. Erin obtient de son avocat de l'employer comme archiviste dans son cabinet. Son allure et son franc-parler ne lui valent pas des débuts faciles mais elle apprend vite.
  5. Elle a quatre sœurs, de jolies adolescentes. Cet incident éclaire d'un jour nouveau le mode de vie de toute la famille.
  6. "Le physicien" dans le film s'appelle "Le professeur", nous n'avons pas modifié le texte.
  7. Plaquette présentation du film, Film de ma vie, Editions FNAC, 1979.
  8. Code de l'environnement. Site ineris.fr
  9. Mathieu 27. 33.
  10. Chevalier/Gherrbrant, Dictionnaire des Symboles, op. cit. p. 187. Par ailleurs, les traditions chinoises font un distinguo entre cendre humide (présage de mort) et cendre sèche (capable d'arrêter les eaux du déluge). Ibid, p. 187.
  11. Nous imaginons que cette hypothèse peut surprendre et que l’on est en droit de poser la question de sa légitimité. Après tout, est-on obligé de pousser une hypothèse à un tel degré ? Ce que l’on peut dire, c’est que nous n’inventons rien. L’analyse part toujours à partir de l’image, et c’est à l’appui des données des images que nous arrivons parfois à des hypothèses surprenantes.


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