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Version du 7 avril 2013 à 14:38
« L'attente ne se décrit pas de façon "externe" par l'indicationde ce qui est attendu ; la description de l'attente par ce dont elle est l'attente est une description interne. »
L. Wittgenstein.[1]
—
« Ce n'est jamais qu'à cause d'un état d'esprit qui n'est pasdestiné à durer qu'on prend des résolutions définitives. »
M. Proust.[2]
—
Titres des films
Mode d'emploi de la figure (mot) et abréviations
Titre | Titre original | Réalisation | Scénario | Année | Pays | Durée (min.) |
---|---|---|---|---|---|---|
Attente | Masharawi Rashid | Masharawi R. Kronop O. |
2006 | France Palestine |
90 | |
Contre toute attente | Agaisnt all odds | Hackford Taylor | Hughes Eric | 1984 | USA | 128 |
Liste d'attente | Lista de espera | Tabio Juan Carlos | Arango A. Pas S. |
2000 | Cuba | 102 |
Autres titres de films
Mode d'emploi de la figure (mot) et abréviations
Titre | Titre original | Réalisation | Scénario | Année | Pays | Durée |
---|---|---|---|---|---|---|
Miroir (Le) | Zerkalo | Tarkovski Andreï | Tarkovski A. Micharine A. |
1975 | URSS | 106 |
Nostalghia | Nostalghia | Tarkovski Andreï | Tarkovski A. Guerra T. |
1983 | URSS Italie |
130 |
Pledge (The) §. La longue attente de Jerry |
Pledge (The) | Penn Sean | Kromolowski Jerzy, Olson-Kromolowski Mary | 2001 | USA | 124 |
Retour (Le) | Vozvrashcheniye | Zvyaguintsev Andreï | Moïseenko V. Novotoski A. |
2003 | Russie | 105 |
Salaire de la Peur (Le) | Salaire de la Peur (Le) | Clouzot Henri-Georges | 1953 | France Italie |
139 |
Photogrammes extraits des films - Analyse et liens spécifiques des films
L'attente dans les films d'Andreï Tarkovski
Comme nous allons le voir, plus loin, dans Nostalghia, le thème de l'attente est un thème majeur dans le cinéma de Tarkovski. Il en est même un thème centralisateur, qui traverse presque tous ces films. Il devient le dénominateur commun. L'attente est l'axe central de son cinéma. La liste des protagonistes qui attendent dans ses films est relativement importante, en voilà quelques exemples : Andreï Roublev déchiré par l'homicide involontaire qu'il a commis et qui le jette dans le trouble de l'attente ; l'Écrivain, dans Stalker, qui attendait l'inspiration ; le "Fou" dans Nostalghia qui attendait la fin du monde.
Par ailleurs, Andreï Tarkovski lui-même attendait un temps considérable entre la réalisation de chaque film. Nous-mêmes nous attendons constamment quelque chose, parfois des choses insondables, insoupçonnables. Nous pouvons sans doute dire que l'attente est une constante dans la vie en général, qu'elle soit humaine, végétale ou minérale. C'est une constante dans le processus de développement et de la croissance. L'attente est toujours inscrite dans un cadre temporel défini. En fait, les questions que posent le cinéma d'Andreï Tarkovski sont celles-ci : qu'attendons-nous exactement ? Pourquoi devons-nous attendre ? Quelle est la nécessité d'attendre ? En ce qui nous concerne, ces questions sont importantes à plus d'un titre. D'abord, par rapport au cinéma de Tarkovski (et même au cinéma en général), et aussi, par rapport à la cinémancie, qui constitue en fin de compte une caractéristique que nous proposons d'appeler "protomantique". En effet, il y a divination parce qu'il y a surtout un choix à faire, une décision à prendre, une question à résoudre. C'est en cela que la sémiotique divinatoire, vaste et prolixe, prend souvent appui sur ce facteur dominant. Le stade protomantique est un stade "d'arrêt réflexif". D'ailleurs, l'étymologie du mot « attendre » est révélatrice : du latin "attendere", tendre son esprit vers quelque chose, être attentif à, composé de "tendere", tendu, dans le sens d'être attentif à l'arrivée de quelqu'un ou de quelque chose, on passe aisément à celui de "rester jusqu'à ce que la personne ou la chose arrive." [3]
Le Miroir, d’Andreï Tarkovski
Le feu au fenil ou L'attente brûlante
Plan 6 : 05' 24" : Une jeune femme interprète un double rôle : celui de Maroussia, mère d'Alexeï (Aliocha), le narrateur du film, et celui de Natalia, épouse d'Alexeï et mère d'Ignat qui est le fils du narrateur. C'est Maroussia qui est assise sur une clôture en bois à l'allure incertaine et branlante. Elle fume une cigarette. Elle regarde au loin vers des étendues de champs verdoyants. Panoramique général. D'emblée, deux éléments de la thématique tarkovskienne sont annoncés: l'attente et la limite [4] (la clôture). (Cf. Photogramme – Attente 1)
Au plan 6, cette figure féminine de l'attente rappelle par moment la "figure de Pénélope". Par moment seulement, car, à notre avis, Maroussia ne résistera pas à tous les harcèlements de certains prétendants, et elle ne dissimulera pas "l'attente par le subterfuge d'une activité insolite de tissage et de détissage." [5] Enfin, si dans l'Odyssée, "Pénélope ne joue aucun rôle dans la construction du récit, c'est parce qu'elle n'est que la raison finale du retour." [6] Dans Le Miroir, Maroussia est la raison primordiale dédoublée, elle est le sens dérivé, elle donne même le sens du film. Mais contrairement à Pénélope, et pour tromper l'attente, Maroussia ne se livre pas au tissage, mais à l'action de fumer une cigarette, à l'action de brûler petit à petit le temps et de le transformer en fumée. La cigarette devient par la même occasion le premier indice imperceptible mais tangible du "feu" qui, comme nous allons le voir, a une importance capitale. Mais au bout du compte, Maroussia, rejoint plutôt une autre figure qui hante l'Odyssée : Hélène qui quitte Ménélas pour Pâris. Ainsi la figure du mythe d'Hélène est tout le contraire de celui de Pénélope. Nous allons voir, au fur et à mesure du développement de notre étude, la métamorphose de la figure de Pénélope en celle d'Hélène.
Liens spécifiques du film
Voir : Miroir (Le)
Nostalghia, d’Andreï Tarkovski
La souffrance de l’Attente
Plan 1 : 00' 00" : (1er flash-back.) Une image en noir et blanc. Un paysage brumeux, vaporeux, comme s'il désignait une autre époque, un autre âge, les voiles d'un autre temps. Quatre personnages avancent au centre de l'image. Le temps du passage du générique, ils descendent une pente. Ils restent debout, presque immobiles, figés sur place, incapables de se mouvoir. Comme dans un rêve ? C'est un rêve. (Cf. Photogramme – Attente 2)
Mais d'abord, qui sont ces personnages ? Un enfant et trois femmes vêtues d'un châle noir. Pourquoi cette enveloppe sombre ? Est-ce pour une époque sans ombre ? Pourtant, entre les personnages se promène un chien,[7] un berger allemand. Et, détaché du groupe, au fond de l'image, un cheval blanc broute paisiblement. C'est en fait le pays de Gortchakov, le poète soviétique. Son pays est beau, mais ses habitants sont aux bords de la pente, ils sont statufiés, comme ce fut le cas pour Andreï Tarkovski lui-même. Ce court prologue présente indirectement le point de vue du cinéaste. Nous devons être attentifs à ce type de plan, la succession de ces "petits faits" présente admirablement, en un temps bref, "une vision réaliste" des états de choses [8] : les quatre personnages quittent le plateau d'un talus (un équilibre est rompu), en entreprenant une descente lente (une chute inéluctable), tout en s'enveloppant d'un habit sombre (une protection indispensable ?). De plus, ils se dirigent vers un sentier qui ne mène nulle part (absence de projet).
Il faut remarquer qu'en général, les déplacements topologiques [9] des protagonistes dans les films, participent pleinement dans l'établissement de faits cinémantiques. Ici, "la transformation-déplacement" présente la "souffrance de l'attente". Car, on peut dire que le film est comme Le Miroir, autobiographique. Du moins trop d'incidences nous permettent de le dire : le prénom du poète dans le film, Andreï ; la traductrice qui lit les poèmes d'Arseni Tarkovski ; les diverses allusions à la littérature russe, Tolstoï, Pouchkine. Enfin, c'est le moment où le cinéaste choisit de ne plus entrer en URSS. Les autorités réagissent en gardant son fils et sa belle-mère. Il a fallu l'intervention des grands de ce monde,[10] pour laisser partir sa famille. Le réalisateur a donc vécu "la nostalgie" de l'intérieur. D'ailleurs, l'étymologie du terme dérive du grec, "nostos", "retour au pays" et "olgos", "souffrance", désigne le mal du pays. Ce qui explique, peut-être en partie, l'immobilité des personnages. En effet, l'aspect statique peut exprimer soit un ultime stade d'inactivité, de non-recherche, un stade paradisiaque, si l'on ose dire (accentué par le cheval blanc, qui suggère ici une figure de liberté ou d'innocence [11]), soit un stade "d'attente". Reste à savoir de quelle attente il s'agit. Ce premier plan sera montré une seconde fois, au milieu du film.[12] L'épisode suivant va nous offrir quelques éléments de réponse.
Les sentiers ou les voies de l'attente, "La Madone del Prato"
«Tout est gonflé d'attente. »
J. Epstein. [13]
—
« L'attente a un rapport avec la quête. Je sais après quoi je cherche sans que doive réellement exister ce que je cherche. L'événement qui se substitue à l'attente est la réponse à celle-ci. Cela veut dire que l'attente doit être dans le même espace que ce qui est attendu. »
— Ludwig Wittgenstein.[14]
Plan 3 : 2' 26" : Passage à la couleur. Passage à un autre paysage, presque identique au prologue. (Cf. Photogramme – Arbre.) Une voiture (Volkswagen) s'arrête. La Traductrice, Eugenia sort du véhicule, elle dit en russe : "C'est un paysage extraordinaire… Cette lumière me rappelle l'automne à Moscou."[15] Son compagnon, le Poète Gortchakov, reste dans la voiture, et lui demande de parler en italien. Il restera d'ailleurs longtemps dans la voiture. La Traductrice s'éloigne dans les brumes en empruntant un petit sentier. Après quelques longues secondes d'hésitation, le Poète sort de la voiture en raillant : "J'en ai assez de ces beautés écœurantes."[16] C'est une phrase fracassante, contradictoire qui d'emblée installe (de nouveau) la qualité nostalgique du film : aucune beauté ne peut remplacer le sentiment du pays natal. Mais paradoxalement un fait souligne les deux plans (plans 1 et 3).
Plan 4 : 5' 46" : La Traductrice entre dans une église. Des femmes voilées, agenouillées, prient. Un prêtre entre à gauche du cadre. Il s'adresse à la Traductrice, mais il parle face à la caméra. «
- Le prêtre : Vous voulez avoir un enfant ou une grâce de ne pas en avoir ?
- La Traductrice : Je regardais seulement.
- Le prêtre : Quand il y a quelqu'un de distrait, d'étranger à cette invocation, il ne se passe rien.
- La Traductrice :Que devrait-il se passer ?
- Le prêtre : Tout ce que tu veux, tout ce dont tu as besoin. Mais le "minimum" il faut te mettre à genoux ».
Les paroles du prêtre sonnent comme un oracle, non pas seulement pour la Traductrice, mais aussi, par extension pour les spectateurs en général. Cela explique l'attitude singulière du prêtre qui parle face à la caméra ou en contre- champ (hors-champ), c'est-à-dire au public. "Le minimum" du discours du prêtre est une donnée centrale du film. Car, quelques secondes plus tard,
Plan 6 : 5' 54" : la Traductrice tente la modeste position de la génuflexion. Elle pose son sac sur le sol, se courbe, mais en vain, elle n'arrive pas à se mettre à genoux.
Plan 9 : 8' 11" : La Traductrice décide de partir de l'église. Le prêtre lui dit : "Attends !" C'est un mot oraculaire. Plusieurs structures du film sont basées sur le concept de l'attente.[17] Celui-ci s'articule d'une part d'une manière spatiale, physique. Il est en ainsi par exemple au plan 1, l'attente des personnages dans le prologue, ou au long plan 31 (IVème épisode.), quand le poète après la visite "de la chambre sans fenêtre" s'assied sur le côté gauche du lit : la caméra l'encadre alors sans bouger presque deux minutes. Enfin, au plan 103b, l'attente est représentée lors du discours final du "Fou".[18] Il s'agit de l'étrange disposition en diagonale des personnes sur l'escalier monumentale, attendant l'immolation du "Fou". D'autre part, le concept d'attente s'articule d'une manière temporelle, morale : celle de la Traductrice, vis-à-vis du poète (plan 40 et le plan 72); celle du rêve du compositeur russe Sisnovski, dans sa lettre : "obligés de rester immobiles (plan 77) ; celle de Domenico "le Fou" : "il a gardé sa famille sous clé pendant sept ans, il attendait la fin du monde." (Plan 38.)
Ainsi, la question qui se pose est celle de savoir si la Nostalgie n'est pas une longue attente spatio-temporelle ? Nous verrons souvent, à cet effet, une composition de l'image en perspective classique avec un seul point de fuite.[19] Il faut dire que l'architecture des lieux le permet. La composition en perspective impose à l'image un équilibre latéral des masses, qui suggère une construction "en miroir". Toutefois, cette perspective est souvent arrêtée, "bouchée", elle n'ouvre pas l'espace vers l'infini, mais bien au contraire, elle arrête l'image sur un obstacle (des murs ou un escalier, pour les scènes dans le couloir de l'hôtel). Pourquoi ? Ne peut-on pas dire que le Poète est arrivé au terme de sa mission? Ne devient-il pas ainsi, confondu avec le point de fuite de la perspective fermée ? Cela ne contraint-il pas le regard à revenir ou à se fixer aux premiers plans ?
Plan 10a : 10' 17" : L'attente de la Traductrice n'a pas été vaine. D'abord elle voit passer la procession de la vierge. Ensuite elle assiste à un spectacle unique en son genre. Il s'agit d'une "ouverture symbolique" du ventre de la Vierge de la procession, dont va sortir "triomphalement", une nuée d'oiseaux, tout à coup extrêmement bruyants.[20] (Cf. Photogramme – Attente 3, plan 10b)
Plan 14 : 11' 17" : Mieux encore, après ce spectacle-prodige, la Traductrice, stupéfaite, regarde s'étaler sur un autel chargé de dizaines de cierges, les plumes des oiseaux. (Cf. Photogramme – Attente 4)
Ce plan semble constituer "l'image-clé" du film. Et, quelques secondes plus tard, à l'extérieur, au :
Plan 17 : 11' 57" : (2ème série d'images en flash-back, en noir et blanc.) le poète attend la Traductrice dehors, ne voulant plus admirer l'œuvre de Pierro della Francesca.
Plan 18 : 12' 18" : Il voit tomber à ses pieds, dans une flaque d'eau, une plume blanche. (Cf. Photogramme - Attente 5)
Seconde "image-clé" qui devient une "image-passage". Et plus précisément, "passage du banal, du quotidien à l'héroïque". Car, l'accomplissement du "mystère de sainte-Catherine" est inclus dans le plan 18. Il correspond au point de chute de la plume, dans une flaque d'eau. Il en sera de même au plan 95, une autre plume tombe du ciel, dans une... flaque d'eau. La représentation d'une même figure confirme l'idée que le plan 14 est un plan déterminant. Un symbole.[21]
Le Poète, intrigué, ramasse la plume. Il la contemple, il dirige son regard [22] vers le sentier que la Traductrice a emprunté pour se rendre à l'église. La caméra suit le sentier (Cf. Photogramme - Attente 6), mais au bout du sentier, nous voyons la "maison natale" du Poète, dans les bois. Voilà son église.
C'est le dilemme du poète : "l'inconnu qui s'éveille".[23] Cette jonction des deux espaces, dysphorique et euphorique dirait A. Gardies, est une constante du film, elle s'engage sur plusieurs voies qui est souvent dominée par une structure de base, celle d'une thématique tarkovskienne : le concept de passage. Nous verrons finalement que tout le film s'organise autour de ce concept. De plus, si nous suivons la perspective sémiotique, de définir le récit comme "le passage d'un état antérieur à un état ultérieur opéré à l'aide d'un faire (ou d'un procès)."[24] Nous constaterons, et cela nous ne cessons pas de le répéter que, "la cinémancie" s'articule également sur une "transformation- changement " ou un "passage" entre deux états. Comme l’est l’attente.
Le rêve de Sisnovski
La Traductrice revient avec les valises (77d). Cette fois-ci, elle a les cheveux enroulés sous un béret. Elle se dirige vers la chambre du Poète. Elle sort de son sac la lettre qu'il lui a donnée la veille, à propos du compositeur russe Sisnovski. Elle hésite à frapper. Elle tente de glisser la lettre dans la fente de la porte (77 e). Elle n'y parvient pas. Elle regarde la lettre. Elle se dirige à un endroit éclairé du couloir (77f), et lit la lettre.
Voici en grande partie le contenu de la lettre, il est important :"Cher Piotr Nicolaïvitch… Je suis en Italie depuis deux ans. (…) J'ai fait un rêve angoissant. Je devais représenter une œuvre au théâtre de Monsieur le Comte. Le 1er acte se déroulait dans un parc avec des statues. C'était des hommes nus obligés de rester immobiles. Moi aussi, j'étais une statue. Si l'on bougeait, on subissait des châtiments terribles. Car notre seigneur et maître nous observaient personnellement. Je sentais le froid du socle en marbre. Les feuilles se posaient sur mon bras levé. J'étais immobile. Quand j'ai senti que j'allais bouger, je me suis réveillé. J'étais effrayé (…)." La traductrice n'a pas terminé de lire la lettre. Paradoxe : le Poète entre à gauche du cadre en premier plan dans le couloir.
Il y aurait beaucoup à dire sur cette lettre, notamment en ce qui concerne l'aspect politique : "Car notre seigneur et maître nous observait continuellement", c'est une représentation de "l'œil", celle de "Big Brother" du roman d'Orwell. Mais ce qui peut paraître pertinent dans ce rêve, c'est qu'il suit à cinq minutes près "le rêve de la Traductrice", et que le rêve est lu par elle. Il y a ensuite une double opposition matérielle, d'une part, la mollesse organique de l'insecte, et la solidité minérale de la statue de marbre, d'autre part le mouvement de l'insecte et l'immobilité.[25] Enfin, il reste le fait d'avoir raconté son rêve au Poète dans sa chambre, et de lire le rêve de Sisnovski dans le couloir. En outre, soulignons que le poète avait la lettre dans sa poche, et elle a été remplacée par un autre "rêve", la bougie du "Fou". Mais ce n'est pas tout. Dès que la Traductrice termine la lecture du rêve, le Poète est allongé sur un canapé, il rêve...
Liens spécifiques du film
Voir : Nostalghia
Notes et références
- ↑ Remarques philosophiques, traduit de l'allemand par Jacques Fauve, Editions Gallimard, Paris, (1964) 1975, p. 75.
- ↑ A l'Ombre des Jeunes filles en fleurs, 2nd tome d’A la recherche du temps perdu, Editions Gallimard, 1954, p. 185.
- ↑ Cf. aussi en particulier, un ouvrage collectif, dans la collection "Autrement", L'attente, Et si demain…, dirigé par Claudie Danzier et Alice Chalonset, série Mutations – N° 141- janvier 1994, Paris.
- ↑ Cf. G. Deleuze, L'Image-Mouvement, Les Éditions de Minuit, Paris, 1983. pp. 25 ; 254.
- ↑ E. Delebecque, La construction de l'Odyssée, Éditions les belles lettres, Paris, 1980, pp. 125-126.
- ↑ Ibid. p. 107.
- ↑ Nous distinguons difficilement le chien dans le photogramme proposé.
- ↑ Cet aspect important explique le soin que nous portons dans la "description" méticuleuse de l'image. Ce n'est qu'à partir d'une telle précision que nous avons l'espoir d'interpréter avec pertinence nos hypothèses.
- ↑ Cf. André Gardies, L'espace au cinéma, 3ème partie : "L'espace narratif", en particulier, chapitre 1. "Essai de topographie". pp. 105-130. Nous suivons, sans difficultés A. Gardies lorsqu'il cite A.-J. Greimas, "au-delà même des seules contraintes narratives, l'espace n'est là que pour être pris en charge et signifie autre chose que l'espace, c'est-à-dire l'homme, qui est le signifié de tous les langages. ( Greimas, Sémiotique et sciences sociales, Ed. Seuil, Paris, 1976, p. 130.)" op. cit., p. 115. Toutefois, nous pensons, contrairement à A. Gardies, qu'il y a "urgence" dans la création de néologisme (p. 110.) En effet, dans Le Salaire de la peur (pp. 117-127) la série d'épreuves que traverse Mario ne sont-elles pas des indices "cinémantiques" ? L'image de Mario dans la "mare de pétrole"noire, n'annonce-t-elle pas le noir avenir qui l'attend ? Cf. également, F. Cesarman, (...) "on comprend aujourd'hui ce que sont les déplacements, les condensations, les projections, la façon qu'ont les symptômes de se transformer en problèmes organiques et de changer l'image du corps propre, la symbolisation qui répond à la représentation verbale des images, véritable langage de l'inconscient… " Luis Buñuel, traduit de l'espagnol par Annie Morvan, Éditions du Dauphin, Paris, 1982, pp. 39 et 49.
- ↑ Ronald Reagan, Président des USA, et François Mitterrand, Président de la France.
- ↑ Cf. F. Farago, "La réalité plénière du spirituel", Andreï Tarkovski, Etudes cinématographiques, N° 135-138, Editions Lettres Modernes, Minard, Paris, 1983. p. 28.
- ↑ Cf. Plans 79-80.
- ↑ Tome 1, 1921-1949, Éditions Seghers, 1974, p. 92.
- ↑ Remarques Philosophiques, traduit de l'allemand par Jacques Fauve, Editions Gallimard, Paris, (1964) 1975, p. 16.
- ↑ François Ramasse,dans son article sur Nostalghia, se trompe quand il écrit que c'est Gortchakov qui fait la remarque à propos de "la lumière", cela a pour conséquence de modifier son analyse. (Présenté par Michel Estève), Andreï Tarkovski, Études cinématographiques, N° 135-138, Éditions Lettres Modernes, Minard, Paris, 1983, p. 120.
- ↑ Pour sa part, Rainer Maria Rilke écrit : (...) "Car le beau n'est rien d'autre que ce début de l'horrible qu'à peine nous pouvons encore supporter.". "Denn das Schöne ist nichts als des Schrecklichen Anfang, den wir noch grade ertagen, und wir bewundern es so, ..." Élégies de Duino, traduction de J. – P. Lefebvre, Poésie/Gallimard, Paris, (1912-1922) 1994, 1ère Élégie, vers 4,5, p. 29.
- ↑ Cf. J. Mitry, tome 2, la séquence de l'attente qui précède l'attaque des Chevaliers Teutoniques, dans Alexandre Nevsky, de S. Eisenstein, Esthétique et Psychologie du cinéma, 2 volumes, P.U.F. 1963 et 1965, pp. 149-151. J. Donner, Ingmar Bergman, Editions Seghers, Paris, (1962) 1970, L'Attente des femmes (Kvinnodröm Väntran) p. 35 ; A travers le miroir, 108. I. Lotman, Attente de l'auditoire, Esthétique et sémiotique du cinéma, traduit du russe par Sabine Breuillard, Editions sociales, Paris, 1977, p. 93. Cf. Internet : Apologie de l'attente, Josianne Rigoli écrit : (...) "A force de vivre en accéléré, et de vouloir tout tout de suite, on se prive de l’essentiel : la capacité de forger son destin dans l’imaginaire. Sans attente, pas de rêves, pas de projets, la vie est plate. Et frustrante."
- ↑ "L'illuminé" dans le texte de présentation du film, c'est Domenico, nous l'appellerons "le Fou", car il est ainsi appelé dans le film.
- ↑ Comme la plupart des plans dans le hall de l'hôtel Palma : plans 19-24, 76-77, et surtout le dernier plan du film, le plan 122, le Poète, le chien, la flaque d'eau et la maison du Poète, au centre du transept de la cathédrale en ruine.
- ↑ Cf. François Ramasse, op. cit., p. 125.
- ↑ François Ramasse parle à juste titre de "dédoublement", op. cit., pp. 124 ; 127-128 ; 138. D'un point de vue anthropologique, on peut parler d'une "protase", (...) "La protase marque, au "présent" ou au "passé", un état de fait, réalisé et observé. Elle donne la situation du "présage", c'est-à-dire l'aspect précis de l'objet supposé propre à laisser entrevoir l'avenir, à le pronostiquer. L'apodose, au "futur", marque presque toujours ce pronostic lui-même : la portion d'avenir que commande et laisse deviner le présage ; elle contient "l'oracle". Aussi peut-on dire indifféremment "présage" ou "protase", d'une part ; et "oracle" ou "apodose" de l'autre." Cf. Article de Jean Bottéro, "Symptômes, signes, écritures en Mésopotamie ancienne" in, Divination et rationalité, (Recherches anthropologiques sous la direction de Remo Guidieri), Editions du Seuil, Paris, 1974, pp. 82-83.
- ↑ Il est à remarquer la grande valeur du "jeu de regard", dans ce film, et dans les films d'Andreï Tarkovski en général, qui équivaut à un mouvement de caméra. Ici, le regard (comme un contre-champ) se métamorphose souvent en chemin, particulièrement de la part du Poète, qui parle peu, avec la bouche, mais qui est prolixe des yeux.
- ↑ R. M. Rilke continue la 1ère élégie ainsi : (...) "Et nous le trouvons beau parce qu'impassible il se refuse à nous détruire ; tout ange est terrifiant." Élégies de Duino, traduction de J. – P. Lefebvre, Éditions Poésie/Gallimard, (1922) 1994, pp. 28-29. "weil es gelassen verschmäht, uns zu zerstören. Ein jeder Engel ist schrecklich."
- ↑ A.J. Greimas et J. Courtès, Sémiotique, dictionnaire raisonné de la théorie du langage, Hachette, Paris, 1980. Citée par A. Gardies, L'Espace au Cinéma, Éditions Méridiens Klincksieck, 1993, p. 136.
- ↑ Dans Andreï Roublev nous analyserons "le rêve de la tête dévissée d'Andreï Roublev", dans lequel le peintre rêva qu'il était aussi une statue.