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Tarkovski Andreï

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/* Andreï Tarkovski ou l'enfance troublée */
====La langue arabe (1950-1952)====
Larissa Tarkovski, la seconde épouse, nous livre une indication sur l'émerveillement de son mari pour la langue arabe : (…) "Cette langue l'éblouissait parce qu'on y trouve des centaines de mots pour désigner le chameau. Le chameau mâle, femelle, les petits chameaux à des âges différents. (…) Tous reçoivent un nom à part. (Il lui disait: ) "J'avais l'impression que leur nom dépendait du moment de la journée et du jour de la semaine." <ref>Cf. '''Larissa Tarkovski''', ''Andreï Tarkovski'', Éditions Calman-Lévy, 1998, p.36. </ref> Outre ce fait biographique, l'entrée de Tarkovski à l'Institut des Etudes Orientales soulève la question du rapport de l'Orient avec le cinéma de Tarkovski. Peut être est-elle liée aussi à un critère héréditaire ? La famille Tarkovski était en effet une, (…) "famille régnante sur la ville de Tarki, au Daghestan, au nord-ouest de la mer Caspienne, du XVème siècle au XIXème siècle, de religion musulmane, convertie au christianisme en 1793, qui passe alors sous la protection de la Russie de Catherine II." <ref> '''Andreï Tarkovski''', ''Cahier Journal 1970-1986'', ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', p. 463. </ref> Nous ajoutons donc à présent un second critère, le critère religieux, qui a sans doute eu une influence dans une liaison avec le sacré chrétien pour aboutir en quelque sorte à un sacré universel. Cependant, comme nous l'avons rappelé rapidement, la [[superstition]] est étroitement liée au religieux. Du coup, le particularisme religieux de Tarkovski d'abord musulman, ensuite chrétien orthodoxe est certainement une contribution importante à son intérêt pour les phénomènes [[Parapsychologie|parapsychologiques]].
Par ailleurs, l'aspect orientalisant a d'une part une importance dans la [[Son (bande-son)|bande-son]], au niveau de la musique, particulièrement dans ''[[Stalker]]'' par exemple, et d'autre part, sur la bande image, ce qui se traduit au niveau de l'approche et de la recherche d'un absolu de l'image, dans une espèce de "calligraphie cinématographique lumineuse".<ref>Certes cette notion prête à confusion, mais nous pouvons la comparer à la perfection stylistique de la calligraphie orientale, et par prolongement à la calligraphie extrême-orientale et à sa poésie, comme par exemple l'importance de la poésie haïku dans ses écrits. </ref> Cette "calligraphie" s'appuie d'une part essentiellement sur des mouvements spécifiques de la caméra, lents et soignés, et d'autre part, sur une mise en scène simple et sobre, "sans fioritures" comme le dit Kyril, à propos de la peinture de Théophane le Grec, dans ''[[Andreï Roublev]]''.
Si la peinture, la musique, la poésie et l'arabe ont contribué à une mise au point (et en pratique) de la bande son et de la bande image, la géologie apporte une large contribution d'une part, à l'aspect matériel de la composition filmique, et d'autre part, à la structuration des scénarios et des films, élaborés par un procédé qu'on pourrait appeler, "un procédé par stratification", c'est-à-dire, une composition en couche non finie. De plus, "Gé", la terre, appelle "[[Topo-analyse|topos]]", le lieu. Mieux, le lieu est inclus dans la terre. Il est la terre. Comme en géologie, où la moindre couche, la plus fine, est un indice révélateur sur la conception vitale d'un certain biotope : sa faune, sa flore, en bref, l'élaboration d'un monde. Les plans chez Tarkovski ont souvent cette faculté d'établir une structure édifiante d'un complexe à résonance multiple. Nous expliquerons plus longuement dans le cœur de notre étude cet aspect spécial.
Ainsi, "la terre" appelle "le lieu", et le premier lieu avant le cinéma, c'est une expédition en Sibérie, dans le cadre d'un projet d'exploration avec une équipe de géologues. <span id="ancre_hist"></span>C'était en 1955, Larissa Tarkovski nous raconte une '''[[Insolite|histoire extraordinaire]]''' qui est arrivée à son mari : (…) "Un homme que l'on avait surnommé "le vieux", et qui avait passé des années dans la taïga (forêt de conifères ), apprit à Andreï a traiter la nature d'égal à égal. (…) Un soir, il (Andreï) arriva, harassé, dans un petit refuge où il décida de passer la nuit. Un orage venait d'éclater. (…) Il mit le cheval et la charrette à l'abri, se coucha et tenta de s'endormir. Soudain il entendit une voix menaçante: "Va-t-en d'ici." (…) C'est la fatigue, se dit-il, et il se recoucha. De nouveau, la même voix, pressante et inquiète : "Je t'ai déjà dit de partir, qu'est-ce que tu attends?" (…) Il s'allongea de nouveau, et cette fois-ci, ce fut un cri : "Fous le camp, c'est la dernière fois que je te le dis!" Cette fois-ci, il se leva précipitamment, courut hors du refuge, (…) A peine eut-il parcouru quelques dizaines de mètres qu'un pin immense se détacha… vacilla, et s'effondra… éventré par un éclair. (…) Ces bruits recouvrirent le sinistre craquement du refuge écrasé." <ref> Cf. '''Larissa Tarkovski,''' ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', pp. 40-41. </ref>
Voilà un témoignage troublant d'un exemple de "cinémancie biographique, extra-cinématographique", si l'on ose dire, concernant la vie du réalisateur, c'est aussi, un cas exceptionnel d'omen répété.(Voir : Clédon) Quand la voix (le vieux ! ) dit : (…) "Va-t-en d'ici !", cela impliquait, "pars de la Sibérie", "ta place n'est pas ici", "ta place est ailleurs". Tarkovski suit donc le conseil de "la voix" et décide en 1956 de se présenter à l'examen d'entrée du VGIK. <ref>VGIK : Institut d'Etat du Cinéma </ref>