Charley-Le-Borgne
Aspects techniques du film
- Titre : Charley-Le-Borgne
- Titre original : Charley-One-Eye
- Réalisation : Chaffey Don (Réalisateur de la série Chapeau melon et bottes de cuir.)
- Année de réalisation : 1973
- Pays : USA
- 96 minutes, couleur
- Langue : Anglais
- Production : Swann James
- Scénario : Leonard Keith
- Directeur Photographie : Talbot Kenneth
- Décors :
- Costumes : Nicholis Tiny
- Musique : Cameron John
- Montage :
Principaux acteurs
- Richard Roundtree : L'homme noir qu'on appellera le Soldat
- Roy Thinnes : L'Indien
- Nigel Davenport : Le chasseur de primes
- Jill Pearson : La femme du colonel (courte apparition)
- David Lodge : Le colonel (courte apparition)
- Aldo Sambrell : Le conducteur mexicain
- Luis Aller : Le jeune mexicain
- Rafael Albaicin : Le chef mexicain
Introduction : Charley-Le-Borgne ou « la face cachée du western »
Les commentaires de ce film sur internet sont rares, nous constatons qu'il n'a pas la place qu'il mérite. Il est vrai qu'il sort de l'ordinaire – et c'est justement pour cette raison qu'il nous intéresse. Car, en ce qui nous concerne, ce film a des qualités pertinentes et subtiles.
Tout d'abord, à son niveau général, le film semble s'appuyer sur la métaphore de la parabole de l'aveugle [1] : la chute du Soldat qui entraîne dans sa chute l'Indien et qui à son tour va entraîner la chute du chasseur, parce qu'il a tiré stupidement (et nous rejoignons le titre du film), sur le coq Charley-Le-Borgne.
Ensuite, la « face cachée du western » installe les deux principaux protagonistes, comme il se doit, dans un désert, géographiquement à la frontière mexicaine. Jadis des ennemis, le Soldat et l'Indien vont cohabiter dans un huis clos qui va les conduire à fraterniser. Le Soldat est poursuivi par un chasseur de primes et ils n'ont presque rien pour survivre dans un milieu aride et hostile. Ils rappellent de la sorte, la vie des premiers hommes sur terre ou il fallait fabriquer (inventer) l'objet de ses besoins : l'arc et la flèche pour manger, une corde pour puiser l'eau d'un puits.
Enfin, l'organisation filmique est minimaliste, elle s'appuie sur des « économies de moyens » qui a retenue notre attention, comme nous allons le voir, dès l'ouverture du film.
Les photogrammes pertinents du film
0h 00’ 00’’ – L'ouverture du film : Un homme en fuite
- Photogramme 1. Premier plan du film. 00h 00' 00" : Un plan d'ensemble savamment construit : un premier plan d'herbe flou qui lézarde de bas vers le haut, l'arrière plan divisé en trois parties presque égales : un sol rocailleux, des montagnes et le ciel. Au milieu de la ligne d'horizon, un gros point noir jaillit et grossit pour finir par représenter un homme qui court.
Commence aussi, sur la bande-son, le son contrasté d'un roulement de tambour lent et inquiétant, comme celui qui précède une exécution de peine de mort et la mélodie innocente d'une flûte.
- Photogramme 2. 00h 00' 27" : Gros plan sur le Soldat essouflé, il halète bruyamment. Il regarde en arrière pour s'assurer qu'il n'est pas poursuivi.
Mais, en regardant en arrière, le Soldat regarde aussi dans le passé. Changement de cadre :
0h 00’ 29’’ – 1er flashback – La femme du colonel
Défile une première série de trois plans :
- Photogramme 3. 00h 00' 29" : Le Soldat, fusil à l'épaule, garde une entrée d'un édifice militaire. Il a une belle allure, la tête haute et le regard droit.
- Photogramme 4. 00h 00' 36" : Le plan suivant représente le colonel en grande tenue accompagné de son épouse, vêtue de blanc et d'un grand chapeau. C'est l'assurance de ne pas passer inaperçue.
- Photogramme 5. 00h 00' 41" : La femme tenant son grand chapeau, regarde en direction du Soldat, elle lui lance un regard espiègle, qui en dit long.
C'est la première surprise du film, l'incrustation de trois plans court en flash-back. Ils déclinent en trois temps, un moment important du passé du Soldat. C'est l'histoire du Soldat en une quinzaine de secondes. On ne peut pas faire plus court. C'est le propos de la partie suivante :
Le procédé de « l'économie des moyens » au cinéma
Il nous semble qu'un film qui a cette caractéristique est en général un film pertinent. L'économie des moyens au cinéma vise, entre autres, à simplifier le langage cinématographique, pour amplifier l'émotion engendrée par les images. Elle évite de la sorte, ce que nous appelons par « remplissage », des séquences inutiles, comme l'introduction de séquence chantée, de promenade interminable, de course-poursuite.
Mais, d'un autre côté, le procédé de « l'économie des moyens » peut avoir des petits inconvénients :
- Les scènes « glissent » rapidement dans le déroulement filmique, en ne laissant pas au spectateur le temps de saisir la subtilité du langage ;
- L'utilisation de la figure de l'ellipse[2] est à la fois sophistiquée et simple, mais souvent logique, comme nous allons le voir plus loin ;
- L'économie des moyens devient pertinente quand le réalisateur incruste des inserts[3] isolés et extérieur aux scènes d'origine, qui n'appartiennent pas à ce qu'on vient de voir, mais au contraire montrent autre chose : la face cachée du Soldat.
La conséquence du procédé dans le film
Trois plans qui indiquent trois moments, trois protagonistes. Cette qualité rappelle une forme poétique comparable à un haïku.[4] Le réalisateur utilisera cette technique une seconde fois, une dizaine de minutes plus tard.
En somme, pour l'ouverture du film, nous obtenons deux séries :
- Une première série de deux plans, elle exprime l'effet d'une action : un homme court, épuisé dans un désert. Et en regardant en arrière, il regarde aussi son passé. Le passé, c'est le sujet de la série suivante ;
- La seconde série, le haïku, exprime la cause de l'effet : la femme du colonel.
La série des trois plans suivants nous donnent un indice sur la suite de l'effet de l'action :
0h 00’ 51’’ – Le combat des chiens – Générique du film
- Photogramme 6. 00h 00' 51" : Gros plan d'un chien noir qui mange avec avidité les entrailles d'un petit agneau.
La mélodie de la flûte s'arrête, elle a commencé à l'ouverture du film.
- Photogramme 7. 00h 01' 05" : Surgit un chien blanc qui saute sur le chien noir. Un combat féroce s'engage entre les chiens, ils sont difficilement visibles, tellement il y a de la poussière.
La mélodie de la flûte est remplacée par les aboiements féroces des deux chiens enragés.
- Photogramme 8. 00h 01' 08" : Le Soldat profite de la situation pour se saisir de l'agneau déchiqueté par le chien noir et en mange à plein dents. Arrêt sur image, apparaît en surimpression le titre du film : Charley-One-Eye.
Avec huit plans et un peu plus d'une minute, la situation est déjà en place, il faut reconnaître la maîtrise d'un talent subtil. D'autant plus que le réalisateur laisse planer le doute, en effet, les questions qui se pose sont nombreuses : qu'elle est la place de la 3ème série ? Pourquoi la série s'appuie sur deux chiens aux couleurs diamétralement opposé ? Est-ce que le chien noir est une représentation métaphorique du Soldat et le chien blanc exprime le colonel ? Est-ce que l'agneau est une représentation de l'épouse du colonel ? En fait, comme la première image du film, l'intrigue commence aussi par des passages flous.
- Écran noir silencieux.
0h 01’ 09’’ – La rencontre du Soldat avec l'Indien
- Photogramme 9. 00h 01' 09" : Plan d'ensemble. Le Soldat au milieu du désert, surgit aux alentours du campement paisible de l'Indien, ce dernier est couché.
- Photogramme 10. 00h 01' 42" : Le Soldat veut surprendre l'Indien, il s'approche en silence et en gros plan, menace l'Indien avec un grand couteau, en lui ordonnant de rester silencieux : « Chut ! Pas un bruit. Ou je te tue. Tu m'entends ? (L'indien cligne les yeux pour signifier qu'il a compris.) Tu es un Indien, hein ? (Le Soldat à un rire sarcastique, d'ailleurs, il riait beaucoup.) Un Indien en chair et en os. Tu as pas envie de me scalper, non ? (Il éclate de rire) Je vais enlever ma main de ta bouche. Si tu tentes quoi que ce soit, tu es mort. Mort ! (Il enlève sa main de la bouche de l'Indien.) Tu as de l'eau ? (L'Indien ne répond pas.) Je t'ai demandé de l'eau.
- L'Indien : Eau. (Il lui montre une gourde.)
- Le Soldat : Donne-moi ça. (Le Soldat saisit la gourde et en boit. Tout en menaçant l'Indien avec son couteau, il lui demande :) Tu as quelque chose à manger ?
- L'Indien : Haricots.
- Le Soldat : Je vois ce qu'il me reste à faire... Lève-toi et prépare à manger. Allez ! (L'Indien se lève.) Tu as pas vraiment l'air d'un Indien. (Silence de l'Indien.) Allez, prépare le repas, je meurs de faim. (L'Indien commence à marcher, le Soldat constate qu'il boîte.) Hé l'Indien ! (En riant.) Tu boîtes ! (Cf. Photogramme 11. 0h 03' 23") J'avais jamais vu un Indien boiteux. Une mésaventure ! (L'Indien veut saisir son sac, le Soldat le repousse violemment et regarde ce qu'il ya dans le sac.) Tu n'auras pas un pistolet là-dedans ? Car si c'était le cas. Voyons ce que tu as. »
- Photogramme 12. 00h 03' 46" : Le Soldat prend le sac de l'Indien et renverse son continue au sol pour l'examiner, il abandonne quand il constate qu'il contient des objets inoffensifs, des assiettes en métal, des bouts de carrelage cassés, des objets hétéroclites. L'Indien ramasse ses objets, en les nettoyant de la poussière et les déposent dans son sac. (Cf. Photogramme 13. 0h 03' 53") Le Soldat s'allonge en observant l'Indien.
- Photogramme 14. 00h 04' 11" : L'Indien s'assied à son tour, nous retrouvons la même composition qu'au premier plan du film, à savoir, l'Indien est cadré avec un premier plan d'herbe qui lézarde l'image. Il est assis, les bras croisés sur les genoux. Il regarde le Soldat qui mange :
- Photogramme 15. 00h 04' 15" : Le Soldat est rassasié : « Pas mal l'Indien ! (Il fait un gros rot.) On dit que les Indiens sont prétentieux. C'est vrai ? »
- Photogramme 16. 00h 04' 27" : Gros plan de l'Indien stoïque, il a le regard perdu dans le vide. Il attend. Le Soldat éclate de rire devant l'attitude impénétrable de l'Indien. Aussitôt, il rote une seconde fois. Le Soldat pense à vois haute : « Cela fait de nous des frères de sang, pas vrai ? (Éclat de rire.) Eh ben ! »
0h 04’ 57’’ – La question du nom de l'Indien
- Photogramme 17. 00h 04' 57" : Le Soldat veut engager la conversation avec l'Indien, il commence par lui demander son nom : « Comment tu t'appelles ? »
- Photogramme 18. 00h 05' 11" : L'Indien ne bouge pas, il reste silencieux. Le Soldat continue à parler : «Allez j'essaye d'être sympa. Comment tu t'appelles ? (Aucune réaction de l'Indien, le Soldat est agacé.) Ne me fais pas répéter ma question. Comment tu t'appelles ? »
- Photogramme 19. 00h 05' 39" : Le Soldat est de plus en plus ennuyé, il prend son couteau, en disant : « Tu sais, l'Indien. Tu commences à m'agacer. (Il se lève et s'approche de l'Indien.) Tout ce que je te demande. C'est un peu de courtoisie. Alors, comment tu t'appelles ? (En articulant lentement chaque mot.) »
- Photogramme 20. 00h 05' 58" : L'Indien est imperturbable. Le Soldat ne sait plus quoi faire. Il change de stratégie. Un large sourire illumine son visage. « Très bien. Laisse-moi deviner... Geronimo ? (Éclat de rire.) »
- Photogramme 21. 00h 06' 08" : « Bisson Assis ? Non, c'est pas ça. Voyons voir ? Grand Aigle ? »
- Photogramme 22. 00h 06' 25" : Le Soldat regarde le pied blessé de l'Indien, qui est serré avec une bande de peau de bête : « Non, je sais. Est-ce que c'est... Ours qui court ? (Brusquement l'Indien se lève, poursuivi par le Soldat qui répète en rigolant.) Ours qui court... Allez l'Indien, dis-moi ton nom. Tu m'as l'air à bout de force. Où tu vas comme ça ? Je t'ai posé une question ! Tu ferais mieux de me répondre.
- L'Indien : (En lui tournant le dos.) Je ne vais nulle part.
- Le Soldat : Ouais. Moi non plus, je ne vais nulle part. Autant y aller ensemble, non ?
- L'Indien : Non. Je vais seul.
- Le Soldat : (En saisissant, violemment, la chemise de l'indien.) Ça , c'est pas sympa, l'Indien. Tu ne m'aimes pas ? J'aime pas qu'on ne m'aime pas. Sois un bon Indien, rassemble tes affaires et fichons le camp. Allez !»
0h 07’ 39’’ – Le changement de camp - Le crachat de l'Indien
- Photogramme 23. 00h 07' 39" : Le Soldat emporte sur son dos le sac de l'Indien, afin de ne pas lui laisser le choix, ce dernier se précipite pour le suivre.
- Photogramme 24. 00h 07' 50" : Le plan suivant, le Soldat qui marchait vite, nargue l'Indien en riant aux éclats : « Hé l'Indien ! Tu fais quoi à traîner ? ».
L'Indien est à son tour agacé, il doit littéralement traîner le pied, qui lui fait certainement souffrir. Il faut dire que sa situation a complétement changé, il y a à peine une heure, il prenait paisiblement sa sieste, et voilà que maintenant il doit subir les ordres d'un Soldat dont on ne sais d'où il vient. C'est trop pour un Indien calme. Il est resté silencieux tout ce temps. Mais, il n'en pouvait plus. Il forme dans sa bouche sèche et pâteuse, une petite boulette de salive et le crache vers la direction du Soldat. (Cf. Photogramme 25. 0h 07' 51")
Il est à noter qu'il faut porter une considération à ce geste, il ne nous semble pas que c'est un geste anodin. Bien au contraire, c'est un geste significatif qui porte, réunit en “boule”, l'ensemble des exactions de la part du Soldat : menace avec un couteau, ton autoritaire, l'Indien devient le larbin du Soldat.
Le crachat exprime ainsi, “La réponse” de l'Indien, mais encore une fois, cette réponse (cette image) est ambiguë, à la fois dans le contexte diégètique [5] et le contexte universelle du symbole (le crachat), est-ce un geste de malédiction ? Est-ce une façon indirecte que l'Indien choisit pour dire au Soldat : Va au diable. ? (Et malheureusement, c'est ce qu'il va lui arriver, à la fin du film.) Ou bien, est-ce un geste de désenvoûtement ? Car, selon une croyance quasi universelle, cracher conjure le sort, écarte le mauvais œil, les esprits malveillants et les démons. [6]
Mais la question reste ouverte, car selon d'autres croyances, les envoûtements à l'aide du crachat sont signalés chez certains peuples de Nouvelle-Zélande, d'Inde, d'Afrique, des Antilles et d'Amérique du Nord. (Cherokee par exemple) (…) "Dans toutes ces régions du monde, on prend soin de ne pas cracher n'importe où et devant n'importe qui (surtout un ennemi) et on dissimule les crachats pour éviter qu'ils ne servent au magicien : "Jusque dans sa propre maison, on essuie avec grand soin sa salive et on le fait disparaître pour la même raison." [7] Enfin, il est à noter que la salive contient l'âme de l'homme. [8]
0h 08’ 02’’ – Le repos - 1 -
Les deux hommes arrivent dans une petite vallée, cernée par des collines.
- Photogramme 26. 00h 08' 51" : Le Soldat décide de prendre du repos. Nous entendons le bruit étrange d'un animal. Il demande à l'Indien : « De l'eau, l'Indien. » L'Indien lui passe sa gourde et s'installe près de lui, en massant son pied droit. Le Soldat boit goulument, et passe la gourde à l'Indien : « T'en veux ? »
- L'Indien : Non.
- Le Soldat : Comme tu voudras, l'Indien. (Le Soldat s'allonge.) Qu'est-ce que j'aime ce soleil ! Pas toi ? (Pas de réponse.) Sens ce doux air frais ! Allez, hume-moi ça, c'est gratuit ! (Le Soldat se redresse.) Geronimo, pourquoi tu cherches à m'énerver ? Quel est ton problème ? (L'Indien se lève en marmonnant des mots incompréhensibles et tourne le dos au Soldat.) Hein ? Qu'est-ce que tu dis ?
- L'Indien : Tout ce que je sens, c'est toi. (Le Soldat, très furieux se lève d'un bond et saisit, pour la seconde fois, la chemise de l'Indien.)
- Le Soldat : (En criant.) Sens-moi ! Sens-moi ! (En le regardant droit dans les yeux.) Tu ferais mieux de t'y habituer parce qu'on va être très proche, toi et moi. Je serai plus proche que ta peau ! (Il rejette l'Indien violemment, loin devant lui et lui tourne le dos. Il commence à raconter son histoire, mais il y aura une grande différence entre ce qu'il dit et les images qui vont passer, une série de trois plans, la suite de la relation du Soldat avec la femme du colonel.)
0h 11’ 00’’ – La vérité sur le soldat - 2nd flashback – La femme du colonel 2
L'histoire du Soldat : « J'étais dans l'armée. (En criant.) Oui, chef ! Soldat de première classe. Payé pour tuer des Blancs. (L'Indien se relève.) Payé pour tuer des Blancs. Quelle blague ! Dieu sait que je l'aurais fait sans rémunération. (L'Indien écoute attentivement.) Ils me payent pour les tuer, et la minute d'après... ils changent d'avis et me condamnent pour ça. »
Cependant les images qui vont suivre vont contredire les propos du Soldat :
- Photogramme 27. 00h 11' 37" : Le colonel entre furieux dans une cabanne en bois. Il veut retirer son pistolet de son étui. En contrechamp, le Soldat est allongé sur un lit.
- Photogramme 28. 00h 11' 30" : Le Soldat plus vif que le colonel, saisit un fusil et tire une balle.
- Photogramme 29. 00h 11' 31" : Le colonel s'effondre en arrosant de son sang sa femme qui pousse des cris hystériques. Le Soldat était donc allongé avec la femme du colonel.
Le Soldat reprend son histoire : « Je ne comprends pas. (Il regarde l'Indien.) Tu comprends, toi ? (L'Indien ne réponds pas.)»
- Photogramme 30. 00h 12' 15" : Le Soldat saisit le sac et le rend à l'Indien, étonné de le recevoir.
- Photogramme 31. 00h 12' 16" : Plan général d'un territoire désertique. Première apparition du chasseur de primes, il est à cheval. Accompagnement au niveau sonore de la mélodie en flûte.
0h 12’ 20’’ – Le soldat qui boite
L'Indien en tête suivit du Soldat avancent sur une colline escarpée.
- Photogramme 32. 00h 12' 25" : Le Soldat, toujours de bonne humeur, commence en riant aux éclats, à imiter l'Indien qui boîte.
- Photogramme 33. 00h 13' 21" : Le Soldat est hilare, il interpelle l'Indien en lui disant : « Hé l'Indien ! Ralentis ! Tu me fais boiter ! »
- Photogramme 34. 00h 13' 25" : A peine il termine sa phrase, le Soldat trébuche mystérieusement et tombe. L'Indien ne s'arrête pas. Le Soldat est étonné de le voir continuer son chemin : « L'Indien ! Tu m'entends ! Reviens-là ! Je me suis cassé la cheville. (Cf. Photogramme 35. 0h 13' 45") L'Indien s'arrête, il hésite, le Soldat continue à crier : Tu m'entends, l'Indien ? Reviens là ! (…) Tu ne vas pas me laisser mourir seul ici, non ? (En criant.) Tout seul pour mourir ! »
- Photogramme 36. 00h 14' 28" : L'Indien continue à garder le silence, le Soldat essaye de se relever, mais il ne parvient pas, il retombe en prenant appui sur ses couteaux (depuis le début il avait confisquer le couteau de l'Indien.) « Si je t'attrape, je te tue. »
Le Soldat se relève avec grande peine et avance vers l'Indien sur une seule jambe, à présent il ressemble à l'Indien : « Tu vas m'attendre. J'ai bien envie de t'en foutre une ! »
- Photogramme 37. 00h 14' 49" : L'Indien finit enfin, par s'exprimer verbalement, en détachant chaque mot : « Je n'avais jamais vu de Noir boiteux avant. » Il commence, à son tour, à imiter le Soldat et à rire aux éclats. (Cf. Photogramme 38. 0h 14' 53") C'est la réponse de l'Indien à la remarque du Soldat quand il lui dit « J'avais jamais vu d'Indien boiteux. »
- Le Soldat : «C'est toi ? C'est bien toi ? Oh, allons ! Je n'y crois pas. Allez, ris, l'Indien. Tu devrais voir ta tête ! » Les deux hommes éclatent de rire un bout de temps.
Non loin de là, le chasseur de primes avance paisiblement vers l'ancien campement des fugitifs. (00h 15' 55")
0h 16’ 11’’ – L'Indien essaye de fabriquer un arc
Les deux hommes sont au repos :
- Le Soldat : Tu n'as que des haricots ? Va donc chasser de la viande.
- L'Indien : Quelle viande ?
- Le Soldat : Oh, il doit bien y avoir un lièvre par ici. Qui attend qu'on en fasse du ragoût.
- L'Indien : Je l'attrape comment ?
- Le Soldat : T'as jamais entendu parler d'un arc ?
- L'Indien : J'en ai pas.
- Le Soldat : Tu peux pas en faire un ?
- L'Indien : Je peux.
- Le Soldat : Et tu attends quoi ?
- L'Indien : J'ai besoin d'un couteau.
- Photogramme 39. 00h 17' 11" : Le Soldat nettoie un couteau et le jette non loin de l'Indien.
Plan en insert du chasseur de primes. (3ème apparition - 00h 17' 55")
- Photogramme 40. 00h 18' 05" : L'Indien commence à raboter un petit bâton en bois, il fait des encoches aux deux extrémités.
- Photogramme 41. 00h 18' 25" : Le cadrage de l'image est intéressante : l'Indien au premier plan avec un effet floutée, continue à façonner son bâton, à l’arrière plan, le Soldat les yeux fermés, se repose.
L'Indien détache de son cou un collier en cuir, sur lequel était suspendu une clé. Il regarde la clé et la dépose dans la poche de son veston.
- Photogramme 42. 00h 19' 27" : L'Indien fait des nœuds au bout de la ficelle, et essaye de courber le bâton afin d'obtenir un arc. Le bâton n'est pas souple, il doit insister à trois reprises. (Cf. Photogramme 43. 0h 19' 32") Il réussit enfin, à glisser le nœud dans l'encoche du bâton. (Cf. Photogramme 44. 0h 19' 59") Il est content du résultat, il fait vibrer le fil qui résonne. (Cf. Photogramme 45. 0h 20' 04")
- Photogramme 46. 00h 20' 41" : Le Soldat se réveille de sa sieste : « Tu as fini ton arc ? » L'Indien s'approche du Soldat et lui montre son arc en la faisant vibrer comme une guimbarde. Ensuite il commence à tirer sur la corde, mais en tirant, l'arc se casse, le Soldat rit aux éclats : « Tu es un sacré Indien, toi ! » (Cf. Photogramme 47. 0h 20' 45")
- Photogramme 48. 00h 20' 59" : Plan en insert, le chasseur de primes qui tue son cheval. (4ème apparition.)
0h 21’ 01’’ – L'arrivée à l'église abandonnée – le puits
- Photogramme 49. 00h 21' 02" :
Le Soldat ouvre les portes de l'église abandonnée et délabrée. Il entre dans l'église, suivit par l'Indien.
Le Soldat commence à prêcher : « Je veux que vous m'écoutiez tous ce matin. Écoutez-moi bien. Vous autres pécheurs. Si vous ne suivez pas le droit chemin et continuez de mentir, de jurer, de vous agiter et de vous bagarrer, vous périrez tous. Oui, vous périrez ! Dans les flammes de l'enfer. Oui. Mais si vous êtes un vrai croyant. (L'Indien trouve un petit objet.) ...de couleur noire. Un des... Noirs, élus de Dieu... vous n'irez pas au paradis. Non, monsieur. Vous n'irez même pas en enfer. Non. Vous resterez ici-même. Là où vous êtes nés. Oui. Donc, vous, mes frères. (…) Car, il n'y a rien... Il n'y a rien de pire. (Il s'adresse à l'Indien.) Geronimo, si je vais au paradis, et qu'il y a des Blancs ou presque Blancs, je les tuerai de mes mains. Ça vaut pour toi. (L'Indien veut sortir.) Où vas-tu ? »
- L'Indien : Voir s'il y a de l'eau dans le puits.
- Photogramme 50 00h 24' 43" : L'Indien scrute le fond du puits.
- Photogramme 51. 00h 24' 48" : Plan d'ensemble, le puits et l'église.
- Photogramme 52. 00h 24' 58" : Le Soldat s'approche à son tour du puits, il regarde au fond : « Il m'a l'air à sec. »
L'Indien saisit une pierre qu'il nettoie de la poussière et la jette au fond du puits. Nous entendons le son de la pierre qui plonge dans de l'eau. Le Soldat : « Il m'a l'air plein. Avec quoi veux-tu puiser de l'eau ? (Il rigole.) Oui, on dirait qu'on va devoir la laisser où elle est. Tu n'as pas de corde, non ? »
Notes et références
- ↑ La parabole du Christ est adressée aux Pharisiens : « Laissez-les. Ce sont des aveugles qui guident des aveugles. Or, si un aveugle guide un aveugle, ils tomberont tous deux dans la fosse. » (Mt 15,14 ; Lc 6,39), également tirée de saint Matthieu, chapitre XV (Source : Wikipédia.)
- ↑ L'ellipse au cinéma est une forme cinématographique qui montre des petits moments d'une action, au lieu de la montrer dans sa totalité, elle évite de la sorte, des détails inutiles qui risquent de nuire à la narration et à la compréhension par le spectateur, par exemple, une personne entre dans un immeuble et au plan suivant il ferme la porte de son appartement.
- ↑ Rappelons qu'un insert est un plan unique, court et isolé, qui insiste ou fait état d'un rappel sur un moment fort. C'est un détail mis en lumière et souvent en gros plan. L'insert participe pleinement dans l'élaboration du rythme filmique, il apporte des modifications dans la partition filmique, si l'on ose dire.
- ↑ Le haïku est d'origine japonaise, c'est la forme poétique la plus courte au monde, le poème se décline en seulement trois vers.
- ↑ Étienne Souriau définit le terme diégèse ainsi : « Tout ce qui est censé se passer, selon la fiction que présente le film ; tout ce que cette fiction impliquerait si on la supposait vraie. » Vocabulaire d'esthétique, p. 240.
- ↑ Éloïse Mozzani, Le Livre des Superstitions. Mythes, Croyances, Légendes, op. cit., p. 1580 sq.
- ↑ James G. Frazer, Le Rameau d'or, op. cit., tome l, Le roi magicien dans la société primitive, tabou et les périls de l'âme, p. 649.
- ↑ Éloïse Mozzani, Ibid.
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