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==La question du choix des réalisateurs== | ==La question du choix des réalisateurs== | ||
A l'origine, notre projet était de considérer quatre films de quatre cinéastes de quatre pays différents. Outre Andreï Tarkovski, nous avons choisi Ingmar Bergman (Suède), Robert Bresson (France), Luis Buñuel (Espagne). Le choix de ces réalisateurs tient d'abord au fait qu'ils sont importants aux yeux d'Andreï Tarkovski, et qu'ils sont souvent cités dans ses écrits. De plus, ils ont entre eux plusieurs points communs : un soin minutieux dans l'élaboration de l'image et du récit, l'innovation dans la réalisation, la régularité d'une recherche perpétuelle, l'invention permanente des sujets, un choix pertinent des objets, une présentation simple et sobre d'une émotion complexe, l'orientation en profondeur dans les préoccupations contemporaines de l'humanité. Ils offrent un nouveau regard sur la place et l'évolution de l'homme, etc. | A l'origine, notre projet était de considérer quatre films de quatre cinéastes de quatre pays différents. Outre Andreï Tarkovski, nous avons choisi [[Bergman Ingmar|Ingmar Bergman]] (Suède), [[Bresson Robert|Robert Bresson]] (France), [[Buñuel Luis|Luis Buñuel]] (Espagne). Le choix de ces réalisateurs tient d'abord au fait qu'ils sont importants aux yeux d'Andreï Tarkovski, et qu'ils sont souvent cités dans ses écrits. De plus, ils ont entre eux plusieurs points communs : un soin minutieux dans l'élaboration de l'image et du récit, l'innovation dans la réalisation, la régularité d'une recherche perpétuelle, l'invention permanente des sujets, un choix pertinent des objets, une présentation simple et sobre d'une émotion complexe, l'orientation en profondeur dans les préoccupations contemporaines de l'humanité. Ils offrent un nouveau regard sur la place et l'évolution de l'homme, etc. | ||
Cependant, dès que nous avons commencé à aborder le cinéma d'Andreï Tarkovski, et au fur et à mesure de notre recherche, nous avons constaté que ses films, à eux seuls proposent un répertoire presque complet d'hypothèses cinémantiques. Le nombre élevé, varié et pertinent des systèmes sémiotiques que nous avons détectés est un facteur déterminant de notre engagement à considérer son cinéma comme un fil conducteur. Car, le choix qui se posait était celui de savoir s'il fallait effectuer une recherche rapide mais superficielle sur les quatre réalisateurs ou alors approfondir le cinéma d'un auteur et inclure par analogie formelle ou auditive d'autres réalisateurs. Nous avons opté pour la seconde solution, car elle permet d'une part d'asseoir solidement la notion cinémantique, et d'autre part, de respecter en partie notre projet. On proposant une esquisse d'un "dictionnaire de la cinémancie", qui concerne plusieurs réalisateurs. C'est le 3ème tome de notre étude. Il permettra de créer des liens, et d'aborder les figures transversalement. | Cependant, dès que nous avons commencé à aborder le cinéma d'Andreï Tarkovski, et au fur et à mesure de notre recherche, nous avons constaté que ses films, à eux seuls proposent un répertoire presque complet d'hypothèses cinémantiques. Le nombre élevé, varié et pertinent des systèmes sémiotiques que nous avons détectés est un facteur déterminant de notre engagement à considérer son cinéma comme un fil conducteur. Car, le choix qui se posait était celui de savoir s'il fallait effectuer une recherche rapide mais superficielle sur les quatre réalisateurs ou alors approfondir le cinéma d'un auteur et inclure par analogie formelle ou auditive d'autres réalisateurs. Nous avons opté pour la seconde solution, car elle permet d'une part d'asseoir solidement la notion cinémantique, et d'autre part, de respecter en partie notre projet. On proposant une esquisse d'un "dictionnaire de la cinémancie", qui concerne plusieurs réalisateurs. C'est le 3ème tome de notre étude. Il permettra de créer des liens, et d'aborder les figures transversalement. | ||
Enfant, Andreï ne resta pas longtemps avec son père poète, Arseni Tarkovski (1907 – 1989). Il vécut avec ses deux parents jusqu'en 1935, puis seulement avec sa mère et sa sœur Marina. Ce sera d'ailleurs le thème central de son film Le Miroir. De la sorte, nous comprenons mieux la valeur de la poésie et des livres dans Le Miroir.<ref>Il avait aussi un oncle poète : | <center>* * *</center> | ||
==Andreï Tarkovski (4 avril 1932 - 29 décembre 1986) ou l'enfance troublé== | |||
Enfant, Andreï ne resta pas longtemps avec son père poète, Arseni Tarkovski (1907 – 1989). Il vécut avec ses deux parents jusqu'en 1935, puis seulement avec sa mère et sa sœur Marina. Ce sera d'ailleurs le thème central de son film ''[[Miroir (Le)|Le Miroir]]''. De la sorte, nous comprenons mieux la valeur de la poésie et des livres dans ''[[Miroir (Le)|Le Miroir]]''.<ref>Il avait aussi un oncle poète : (...) "Valentin Tarkovski (1900 – 1918) partisan de l'anarchiste ukrainien Makhno, ainsi que ses deux grands-parents : Maria Danilovna (1870 – 1943) et Alexandre Tarkovski (1860 – 1920) poète, proche du mouvement "Narodnaïa Volia." '''Andreï Tarkovski''', ''Journal 1970 – 1986'', ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', p.463. Il en est également de même pour toutes les citations dans le texte sur la famille d'Andreï Tarkovski.</ref> Ils ne sont pas comme une valeur ajoutée, mais plutôt comme des éléments prépondérants, fondateurs, qui ont accompagné la jeunesse d'Andreï Tarkovski. Ils sont à la base et au fondement de la production formelle de l'image cinématographique tarkovskienne. Nous n'avons pas pu évacuer la part importante du "tissu poétique" dans les films, qui ont pour ainsi dire des fils de prolongements imperceptibles, et révélateurs. | |||
Durant sa jeunesse, deux grandes phases vont contribuer à sa formation. D'abord, le cycle scolaire (1943-1950) : lycée à Moscou, et cours de musique et de peinture. Ces questions qui ont une place importante dans ses films mériteraient à elles seules une étude approfondie. Nous en parlerons uniquement si cela explicite notre discours. Mais il est juste de dire que Tarkovski peint avec de la lumière sur une pellicule de cellulose. Le cycle extra-scolaire (1950-1955) dont il s'agit est très particulier pour un futur cinéaste, d'abord : la langue arabe, ensuite la géologie. | Durant sa jeunesse, deux grandes phases vont contribuer à sa formation. D'abord, le cycle scolaire (1943-1950) : lycée à Moscou, et cours de musique et de peinture. Ces questions qui ont une place importante dans ses films mériteraient à elles seules une étude approfondie. Nous en parlerons uniquement si cela explicite notre discours. Mais il est juste de dire que Tarkovski peint avec de la lumière sur une pellicule de cellulose. Le cycle extra-scolaire (1950-1955) dont il s'agit est très particulier pour un futur cinéaste, d'abord : la langue arabe, ensuite la géologie. | ||
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===La langue arabe (1950-1952)=== | ===La langue arabe (1950-1952)=== | ||
Par ailleurs, l'aspect orientalisant a d'une part une importance dans la bande son, au niveau de la musique, particulièrement dans Stalker par exemple, et d'autre part, sur la bande image, ce qui se traduit au niveau de l'approche et de la recherche d'un absolu de l'image, dans une espèce de "calligraphie cinématographique lumineuse".<ref>Certes cette notion prête à confusion, mais nous pouvons la comparer à la perfection stylistique de la calligraphie orientale, et par prolongement à la calligraphie extrême-orientale et à sa poésie, comme par exemple l'importance de la poésie haïku dans ses écrits.</ref> Cette "calligraphie" s'appuie d'une part essentiellement sur des mouvements spécifiques de la caméra, lents et soignés, et d'autre part, sur une mise en scène simple et sobre, "sans fioritures" comme le dit Kyril, à propos de la peinture de Théophane le Grec, dans Andreï Roublev. | |||
Larissa Tarkovski, la seconde épouse, nous livre une indication sur l'émerveillement de son mari pour la langue arabe : (…) "Cette langue l'éblouissait parce qu'on y trouve des centaines de mots pour désigner le chameau. Le chameau mâle, femelle, les petits chameaux à des âges différents. (…) Tous reçoivent un nom à part. (Il lui disait: ) "J'avais l'impression que leur nom dépendait du moment de la journée et du jour de la semaine."<ref>Cf. '''Larissa Tarkovski''', ''Andreï Tarkovski'', Editions Calman-Lévy, 1998, p.36.</ref> Outre ce fait biographique, l'entrée de Tarkovski à l'Institut des Etudes Orientales soulève la question du rapport de l'Orient avec le cinéma de Tarkovski. Peut être est-elle liée aussi à un critère héréditaire ? La famille Tarkovski était en effet une, (...) "famille régnante sur la ville de Tarki, au Daghestan, au nord-ouest de la mer Caspienne, du XVème siècle au XIXème siècle, de religion musulmane, convertie au christianisme en 1793, qui passe alors sous la protection de la Russie de Catherine II."<ref>'''Andreï Tarkovski''', ''Cahier Journal 1970-1986'', ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', p. 463.</ref> Nous ajoutons donc à présent un second critère, le critère religieux, qui a sans doute eu une influence dans une liaison avec le sacré chrétien pour aboutir en quelque sorte à un sacré universel. Cependant, comme nous l'avons rappelé rapidement, la superstition est étroitement liée au religieux. Du coup, le particularisme religieux de Tarkovski d'abord musulman, ensuite chrétien orthodoxe est certainement une contribution importante à son intérêt pour les phénomènes parapsychologiques. | |||
Par ailleurs, l'aspect orientalisant a d'une part une importance dans la bande son, au niveau de la musique, particulièrement dans ''[[Stalker]]'' par exemple, et d'autre part, sur la bande image, ce qui se traduit au niveau de l'approche et de la recherche d'un absolu de l'image, dans une espèce de "calligraphie cinématographique lumineuse".<ref>Certes cette notion prête à confusion, mais nous pouvons la comparer à la perfection stylistique de la calligraphie orientale, et par prolongement à la calligraphie extrême-orientale et à sa poésie, comme par exemple l'importance de la poésie haïku dans ses écrits.</ref> Cette "calligraphie" s'appuie d'une part essentiellement sur des mouvements spécifiques de la caméra, lents et soignés, et d'autre part, sur une mise en scène simple et sobre, "sans fioritures" comme le dit Kyril, à propos de la peinture de Théophane le Grec, dans ''[[Andreï Roublev]]''. | |||
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===La géologie (1952-1954)=== | ===La géologie (1952-1954)=== | ||
Si la peinture, la musique, la poésie et l'arabe ont contribué à une mise au point (et en pratique) de la bande son et de la bande image, la géologie apporte une large contribution d'une part, à l'aspect matériel de la composition filmique, et d'autre part, à la structuration des scénarios et des films, élaborés par un procédé qu'on pourrait appeler, "un procédé par stratification", c'est-à-dire, une composition en couche non finie. De plus, "Gé", la terre, appelle "topos", le lieu. Mieux, le lieu est inclus dans la terre. Il est la terre. Comme en géologie, où la moindre couche, la plus fine, est un indice révélateur sur la conception vitale d'un certain biotope : sa faune, sa flore, en bref, l'élaboration d'un monde. Les plans chez Tarkovski ont souvent cette faculté d'établir une structure édifiante d'un complexe à résonance multiple. Nous expliquerons plus longuement dans le cœur de notre étude cet aspect spécial. Ainsi, "la terre" appelle "le lieu", et le premier lieu avant le cinéma, c'est une expédition en Sibérie, dans le cadre d'un projet d'exploration avec une équipe de géologues. C'était en 1955, Larissa Tarkovski nous raconte une histoire extraordinaire qui est arrivée à son mari : (…) "Un homme que l'on avait surnommé "le vieux", et qui avait passé des années dans la taïga (forêt de conifères ), apprit à Andreï a traiter la nature d'égal à égal. (…) Un soir, il (Andreï) arriva, harassé, dans un petit refuge où il décida de passer la nuit. Un orage venait d'éclater. (…) Il mit le cheval et la charrette à l'abri, se coucha et tenta de s'endormir. Soudain il entendit une voix menaçante: "Va-t-en d'ici." (…) C'est la fatigue, se dit-il, et il se recoucha. De nouveau, la même voix, pressante et inquiète : "Je t'ai déjà dit de partir, qu'est-ce que tu attends?" (…) Il s'allongea de nouveau, et cette fois-ci, ce fut un cri : "Fous le camp, c'est la dernière fois que je te le dis!" Cette fois-ci, il se leva précipitamment, courut hors du refuge, (…) A peine eut-il parcouru quelques dizaines de mètres qu'un pin immense se détacha… vacilla, et s'effondra… éventré par un éclair. (…) Ces bruits recouvrirent le sinistre craquement du refuge écrasé."<ref>Cf. Larissa Tarkovski, op. cit., pp. 40-41.</ref> | Si la peinture, la musique, la poésie et l'arabe ont contribué à une mise au point (et en pratique) de la bande son et de la bande image, la géologie apporte une large contribution d'une part, à l'aspect matériel de la composition filmique, et d'autre part, à la structuration des scénarios et des films, élaborés par un procédé qu'on pourrait appeler, "un procédé par stratification", c'est-à-dire, une composition en couche non finie. De plus, "Gé", la terre, appelle "topos", le lieu. Mieux, le lieu est inclus dans la terre. Il est la terre. Comme en géologie, où la moindre couche, la plus fine, est un indice révélateur sur la conception vitale d'un certain biotope : sa faune, sa flore, en bref, l'élaboration d'un monde. Les plans chez Tarkovski ont souvent cette faculté d'établir une structure édifiante d'un complexe à résonance multiple. Nous expliquerons plus longuement dans le cœur de notre étude cet aspect spécial. Ainsi, "la terre" appelle "le lieu", et le premier lieu avant le cinéma, c'est une expédition en Sibérie, dans le cadre d'un projet d'exploration avec une équipe de géologues. C'était en 1955, Larissa Tarkovski nous raconte une histoire extraordinaire qui est arrivée à son mari : (…) "Un homme que l'on avait surnommé "le vieux", et qui avait passé des années dans la taïga (forêt de conifères ), apprit à Andreï a traiter la nature d'égal à égal. (…) Un soir, il (Andreï) arriva, harassé, dans un petit refuge où il décida de passer la nuit. Un orage venait d'éclater. (…) Il mit le cheval et la charrette à l'abri, se coucha et tenta de s'endormir. Soudain il entendit une voix menaçante: "Va-t-en d'ici." (…) C'est la fatigue, se dit-il, et il se recoucha. De nouveau, la même voix, pressante et inquiète : "Je t'ai déjà dit de partir, qu'est-ce que tu attends?" (…) Il s'allongea de nouveau, et cette fois-ci, ce fut un cri : "Fous le camp, c'est la dernière fois que je te le dis!" Cette fois-ci, il se leva précipitamment, courut hors du refuge, (…) A peine eut-il parcouru quelques dizaines de mètres qu'un pin immense se détacha… vacilla, et s'effondra… éventré par un éclair. (…) Ces bruits recouvrirent le sinistre craquement du refuge écrasé."<ref>Cf. '''Larissa Tarkovski''', ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', pp. 40-41.</ref> | ||
Voilà un beau témoignage d'un exemple de "cinémancie biographique, extra-cinématographique", si l'on ose dire, concernant la vie du réalisateur, c'est aussi, un cas exceptionnel d'omen répété. Quand la voix (le vieux ! ) dit : (…) "Va-t-en d'ici !", cela impliquait, "pars de la Sibérie", "ta place n'est pas ici", "ta place est ailleurs". Tarkovski suit donc le conseil de "la voix" et décide en 1956 de se présenter à l'examen d'entrée du VGIK.<ref>Institut d'Etat du Cinéma</ref> | Voilà un beau témoignage d'un exemple de "cinémancie biographique, extra-cinématographique", si l'on ose dire, concernant la vie du réalisateur, c'est aussi, un cas exceptionnel d'omen répété. Quand la voix (le vieux ! ) dit : (…) "Va-t-en d'ici !", cela impliquait, "pars de la Sibérie", "ta place n'est pas ici", "ta place est ailleurs". Tarkovski suit donc le conseil de "la voix" et décide en 1956 de se présenter à l'examen d'entrée du VGIK.<ref>Institut d'Etat du Cinéma</ref> | ||
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==Le cycle cinématographique (1956-1985)== | ==Le cycle cinématographique (1956-1985)== | ||
Il eut comme professeur le réalisateur Russe Mikhaël Romm.<ref>Mikhaël Romm (1901-1971) : | Il eut comme professeur le réalisateur Russe Mikhaël Romm.<ref>Mikhaël Romm (1901-1971) : (...) "Réalisateur russe parmi les plus importants de sa génération; entre autre films, ''Boule de suif, Lénine en octobre, Le Fascisme ordinaire, Et pourtant je crois''. Il enseigna la réalisation au VGIK, et eut pour étudiants, (Outre Andreï Tarkovski) Tchoukraï, Danelia, Choukchine, Iossellani, sur lesquels il exerça une grande influence." (Cf. ''Cahier Journal'', p.448.)</ref> En 1960, il réalise le film de diplôme : ''Le Rouleau compresseur et le violon'' : (…) "Mais Andreï lui-même ne considérait pas ce film comme important et ne le citait pas parmi les films qu'il avait faits. (…) Son premier vrai film, c'est ''L'enfance d'Ivan''. (1962) Premier Lion d'Or du Cinéma soviétique."<ref>Cf. '''Larissa Tarkovski''', ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', pp. 40-41.</ref> A partir de ces brillants résultats, il ne fera malgré tout, qu'un film tous les…quatre ans. ''[[Andreï Roublev]]'' (1966), ''Solaris'' (1970), ''[[Miroir (Le)|Le Miroir]]'' (1974), ''[[Stalker]]'' (1978), ''[[Nostalghia]]'' (1983) et ''Le Sacrifice'' (1985) | ||
Les quatre films cités de notre étude ne se présentent pas dans l'ordre chronologique de réalisation. En réalité, nous avons commencé la rédaction de la Recherche à l'envers, c'est-à-dire en commençant par | Les quatre films cités de notre étude ne se présentent pas dans l'ordre chronologique de réalisation. En réalité, nous avons commencé la rédaction de la Recherche à l'envers, c'est-à-dire en commençant par ''[[Nostalghia]]''. Car il nous a semblé que de cette manière nous arriverions à mieux appréhender et saisir les figures et les objets significatifs dans l'œuvre d'Andreï Tarkovski. C'est une rétro-vision filmographique qui nous permet, en ce qui nous concerne, d'une part, de comprendre les aspects dominants et originels de son œuvre, et d'autre part, d'asseoir nos hypothèses cinémantiques. | ||
Par ailleurs, les quatre films cités obéissent en quelque sorte à la remarque de Gilbert Cohen-Séat, à propos de la classification des films.<ref>Problèmes actuels du cinéma et de l'information visuelle, P.U.F., Paris, 2 volumes, pp. 35 à 43 du volume 2, "Le contenu des films".</ref> Il propose de classer le contenu des films sous quatre grandes rubriques | Par ailleurs, les quatre films cités obéissent en quelque sorte à la remarque de Gilbert Cohen-Séat, à propos de la classification des films.<ref>''Problèmes actuels du cinéma et de l'information visuelle'', P.U.F., Paris, 2 volumes, pp. 35 à 43 du volume 2, "Le contenu des films".</ref> Il propose de classer le contenu des films sous quatre grandes rubriques (...) : "le merveilleux" (qui dépayse brutalement donc agréablement), "le familier" (qui se repaît de "petits faits vrais"…), "l'héroïque" (qui étanche chez le spectateur une générosité sans emploi dans la vie courante), "le dramatique" enfin, qui va droit aux crispations affectives du spectateur…"<ref>Citée par '''C. Metz''', tome 1, ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_4|op. cit.]]'', p. 233.</ref> Nous pensons que les quatre films que nous avons choisis, traduisent, certes, avec parfois des grandes réserves, la quadripartition de Cohen-Séat. En effet, l'apothéose lente et progressive d'''[[Andreï Roublev]]'' se classe sous la rubrique du "merveilleux" ; le film auto-biographique, ''[[Miroir (Le)|Le Miroir]]'', se range dans "le familier" ; ''[[Stalker]]'' peut être inclut dans "le dramatique" et enfin ''[[Nostalghia]]'' dans "l'héroïque". | ||
Enfin, la thèse se divise sur trois sections, trois tomes d'une taille inégale. Dans le premier tome : "Hypothèses et structures cinémantiques", nous avons introduit des approches successives sur l'ensemble des notions sur lesquelles nous allons nous appuyer ; ensuite nous effectuons une mise au point de notre méthode de travail ; enfin nous aborderons, au fur et à mesure de leurs "apparitions", des faits significatifs de trois films d'Andreï Tarkovski : dans Nostalghia ou "La contagion héroïque", nous aborderons des aspects d'une topologie cinémantique ; dans Stalker ou "Le drame d'être", nous développerons d'autres syndromes et symptômes cinémantiques et enfin dans Le Miroir ou "Etat critique ; critique d'état", nous nous attacherons à des aspects cinémantiques qui concernent la famille, le quotidien et la guerre. Dans les films cités, nous abordons presque uniquement des plans spécifiques, en général de très courte durée : une plume qui tombe, une personne qui trébuche, des gros plans d'objets, etc. En bref, des moments fugaces et rapides. L'élaboration de l'étude s'articule en partant de l'action d'un détail d'un plan sur l'ensemble du film. Ce qui nous a conduit à un constat : "pour saisir la profondeur singulière et unique d'un film, nous devons le consulter "plan par plan". C'est ce constat qui nous a conduit à consacrer un tome entier à un seul film : Andreï Roublev. C'est le second tome : "Résultats et postulats cinémantiques". Mais ce constat à son tour nous conduit à un autre fait particulièrement problématique : est-ce qu'il suffit qu'il y ait un seul "plan cinémantique", pour que tout le film acquière un statut cinémantique ? Ce qui implique un élargissement considérable de la question cinémantique, vers des horizons à découvrir. Le troisième tome, nous venons de le dire, est consacré à une esquisse d'un "dictionnaire des figures cinémantiques", dans lequel nous montrons d'une part, la singularité foncière d'un "objet cinémantique", et d'autre part, le fait que l'interprétation cinémantique ne s'applique qu'au cas par cas, toujours à partir d'une image en mouvement. Cela implique en définitive que la cinémancie s'intéresse aux plans "exceptionnels". | Enfin, la thèse se divise sur trois sections, trois tomes d'une taille inégale. Dans le premier tome : "Hypothèses et structures cinémantiques", nous avons introduit des approches successives sur l'ensemble des notions sur lesquelles nous allons nous appuyer ; ensuite nous effectuons une mise au point de notre méthode de travail ; enfin nous aborderons, au fur et à mesure de leurs "apparitions", des faits significatifs de trois films d'Andreï Tarkovski : dans ''[[Nostalghia]]'' ou "La contagion héroïque", nous aborderons des aspects d'une topologie cinémantique ; dans ''[[Stalker]]'' ou "Le drame d'être", nous développerons d'autres syndromes et symptômes cinémantiques et enfin dans ''[[Miroir (Le)|Le Miroir]]'' ou "Etat critique ; critique d'état", nous nous attacherons à des aspects cinémantiques qui concernent la famille, le quotidien et la guerre. Dans les films cités, nous abordons presque uniquement des plans spécifiques, en général de très courte durée : une plume qui tombe, une personne qui trébuche, des gros plans d'objets, etc. En bref, des moments fugaces et rapides. L'élaboration de l'étude s'articule en partant de l'action d'un détail d'un plan sur l'ensemble du film. Ce qui nous a conduit à un constat : "pour saisir la profondeur singulière et unique d'un film, nous devons le consulter "plan par plan". C'est ce constat qui nous a conduit à consacrer un tome entier à un seul film : ''[[Andreï Roublev]]''. C'est le second tome : "Résultats et postulats cinémantiques". Mais ce constat à son tour nous conduit à un autre fait particulièrement problématique : est-ce qu'il suffit qu'il y ait un seul "plan cinémantique", pour que tout le film acquière un statut cinémantique ? Ce qui implique un élargissement considérable de la question cinémantique, vers des horizons à découvrir. Le troisième tome, nous venons de le dire, est consacré à une esquisse d'un "dictionnaire des figures cinémantiques", dans lequel nous montrons d'une part, la singularité foncière d'un "objet cinémantique", et d'autre part, le fait que l'interprétation cinémantique ne s'applique qu'au cas par cas, toujours à partir d'une image en mouvement. Cela implique en définitive que la cinémancie s'intéresse aux plans "exceptionnels". | ||
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== Notes et références == | |||
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Dernière version du 8 avril 2012 à 13:03
La question du choix des réalisateurs
A l'origine, notre projet était de considérer quatre films de quatre cinéastes de quatre pays différents. Outre Andreï Tarkovski, nous avons choisi Ingmar Bergman (Suède), Robert Bresson (France), Luis Buñuel (Espagne). Le choix de ces réalisateurs tient d'abord au fait qu'ils sont importants aux yeux d'Andreï Tarkovski, et qu'ils sont souvent cités dans ses écrits. De plus, ils ont entre eux plusieurs points communs : un soin minutieux dans l'élaboration de l'image et du récit, l'innovation dans la réalisation, la régularité d'une recherche perpétuelle, l'invention permanente des sujets, un choix pertinent des objets, une présentation simple et sobre d'une émotion complexe, l'orientation en profondeur dans les préoccupations contemporaines de l'humanité. Ils offrent un nouveau regard sur la place et l'évolution de l'homme, etc.
Cependant, dès que nous avons commencé à aborder le cinéma d'Andreï Tarkovski, et au fur et à mesure de notre recherche, nous avons constaté que ses films, à eux seuls proposent un répertoire presque complet d'hypothèses cinémantiques. Le nombre élevé, varié et pertinent des systèmes sémiotiques que nous avons détectés est un facteur déterminant de notre engagement à considérer son cinéma comme un fil conducteur. Car, le choix qui se posait était celui de savoir s'il fallait effectuer une recherche rapide mais superficielle sur les quatre réalisateurs ou alors approfondir le cinéma d'un auteur et inclure par analogie formelle ou auditive d'autres réalisateurs. Nous avons opté pour la seconde solution, car elle permet d'une part d'asseoir solidement la notion cinémantique, et d'autre part, de respecter en partie notre projet. On proposant une esquisse d'un "dictionnaire de la cinémancie", qui concerne plusieurs réalisateurs. C'est le 3ème tome de notre étude. Il permettra de créer des liens, et d'aborder les figures transversalement.
Andreï Tarkovski (4 avril 1932 - 29 décembre 1986) ou l'enfance troublé
Enfant, Andreï ne resta pas longtemps avec son père poète, Arseni Tarkovski (1907 – 1989). Il vécut avec ses deux parents jusqu'en 1935, puis seulement avec sa mère et sa sœur Marina. Ce sera d'ailleurs le thème central de son film Le Miroir. De la sorte, nous comprenons mieux la valeur de la poésie et des livres dans Le Miroir.[1] Ils ne sont pas comme une valeur ajoutée, mais plutôt comme des éléments prépondérants, fondateurs, qui ont accompagné la jeunesse d'Andreï Tarkovski. Ils sont à la base et au fondement de la production formelle de l'image cinématographique tarkovskienne. Nous n'avons pas pu évacuer la part importante du "tissu poétique" dans les films, qui ont pour ainsi dire des fils de prolongements imperceptibles, et révélateurs.
Durant sa jeunesse, deux grandes phases vont contribuer à sa formation. D'abord, le cycle scolaire (1943-1950) : lycée à Moscou, et cours de musique et de peinture. Ces questions qui ont une place importante dans ses films mériteraient à elles seules une étude approfondie. Nous en parlerons uniquement si cela explicite notre discours. Mais il est juste de dire que Tarkovski peint avec de la lumière sur une pellicule de cellulose. Le cycle extra-scolaire (1950-1955) dont il s'agit est très particulier pour un futur cinéaste, d'abord : la langue arabe, ensuite la géologie.
La langue arabe (1950-1952)
Larissa Tarkovski, la seconde épouse, nous livre une indication sur l'émerveillement de son mari pour la langue arabe : (…) "Cette langue l'éblouissait parce qu'on y trouve des centaines de mots pour désigner le chameau. Le chameau mâle, femelle, les petits chameaux à des âges différents. (…) Tous reçoivent un nom à part. (Il lui disait: ) "J'avais l'impression que leur nom dépendait du moment de la journée et du jour de la semaine."[2] Outre ce fait biographique, l'entrée de Tarkovski à l'Institut des Etudes Orientales soulève la question du rapport de l'Orient avec le cinéma de Tarkovski. Peut être est-elle liée aussi à un critère héréditaire ? La famille Tarkovski était en effet une, (...) "famille régnante sur la ville de Tarki, au Daghestan, au nord-ouest de la mer Caspienne, du XVème siècle au XIXème siècle, de religion musulmane, convertie au christianisme en 1793, qui passe alors sous la protection de la Russie de Catherine II."[3] Nous ajoutons donc à présent un second critère, le critère religieux, qui a sans doute eu une influence dans une liaison avec le sacré chrétien pour aboutir en quelque sorte à un sacré universel. Cependant, comme nous l'avons rappelé rapidement, la superstition est étroitement liée au religieux. Du coup, le particularisme religieux de Tarkovski d'abord musulman, ensuite chrétien orthodoxe est certainement une contribution importante à son intérêt pour les phénomènes parapsychologiques.
Par ailleurs, l'aspect orientalisant a d'une part une importance dans la bande son, au niveau de la musique, particulièrement dans Stalker par exemple, et d'autre part, sur la bande image, ce qui se traduit au niveau de l'approche et de la recherche d'un absolu de l'image, dans une espèce de "calligraphie cinématographique lumineuse".[4] Cette "calligraphie" s'appuie d'une part essentiellement sur des mouvements spécifiques de la caméra, lents et soignés, et d'autre part, sur une mise en scène simple et sobre, "sans fioritures" comme le dit Kyril, à propos de la peinture de Théophane le Grec, dans Andreï Roublev.
La géologie (1952-1954)
Si la peinture, la musique, la poésie et l'arabe ont contribué à une mise au point (et en pratique) de la bande son et de la bande image, la géologie apporte une large contribution d'une part, à l'aspect matériel de la composition filmique, et d'autre part, à la structuration des scénarios et des films, élaborés par un procédé qu'on pourrait appeler, "un procédé par stratification", c'est-à-dire, une composition en couche non finie. De plus, "Gé", la terre, appelle "topos", le lieu. Mieux, le lieu est inclus dans la terre. Il est la terre. Comme en géologie, où la moindre couche, la plus fine, est un indice révélateur sur la conception vitale d'un certain biotope : sa faune, sa flore, en bref, l'élaboration d'un monde. Les plans chez Tarkovski ont souvent cette faculté d'établir une structure édifiante d'un complexe à résonance multiple. Nous expliquerons plus longuement dans le cœur de notre étude cet aspect spécial. Ainsi, "la terre" appelle "le lieu", et le premier lieu avant le cinéma, c'est une expédition en Sibérie, dans le cadre d'un projet d'exploration avec une équipe de géologues. C'était en 1955, Larissa Tarkovski nous raconte une histoire extraordinaire qui est arrivée à son mari : (…) "Un homme que l'on avait surnommé "le vieux", et qui avait passé des années dans la taïga (forêt de conifères ), apprit à Andreï a traiter la nature d'égal à égal. (…) Un soir, il (Andreï) arriva, harassé, dans un petit refuge où il décida de passer la nuit. Un orage venait d'éclater. (…) Il mit le cheval et la charrette à l'abri, se coucha et tenta de s'endormir. Soudain il entendit une voix menaçante: "Va-t-en d'ici." (…) C'est la fatigue, se dit-il, et il se recoucha. De nouveau, la même voix, pressante et inquiète : "Je t'ai déjà dit de partir, qu'est-ce que tu attends?" (…) Il s'allongea de nouveau, et cette fois-ci, ce fut un cri : "Fous le camp, c'est la dernière fois que je te le dis!" Cette fois-ci, il se leva précipitamment, courut hors du refuge, (…) A peine eut-il parcouru quelques dizaines de mètres qu'un pin immense se détacha… vacilla, et s'effondra… éventré par un éclair. (…) Ces bruits recouvrirent le sinistre craquement du refuge écrasé."[5]
Voilà un beau témoignage d'un exemple de "cinémancie biographique, extra-cinématographique", si l'on ose dire, concernant la vie du réalisateur, c'est aussi, un cas exceptionnel d'omen répété. Quand la voix (le vieux ! ) dit : (…) "Va-t-en d'ici !", cela impliquait, "pars de la Sibérie", "ta place n'est pas ici", "ta place est ailleurs". Tarkovski suit donc le conseil de "la voix" et décide en 1956 de se présenter à l'examen d'entrée du VGIK.[6]
Le cycle cinématographique (1956-1985)
Il eut comme professeur le réalisateur Russe Mikhaël Romm.[7] En 1960, il réalise le film de diplôme : Le Rouleau compresseur et le violon : (…) "Mais Andreï lui-même ne considérait pas ce film comme important et ne le citait pas parmi les films qu'il avait faits. (…) Son premier vrai film, c'est L'enfance d'Ivan. (1962) Premier Lion d'Or du Cinéma soviétique."[8] A partir de ces brillants résultats, il ne fera malgré tout, qu'un film tous les…quatre ans. Andreï Roublev (1966), Solaris (1970), Le Miroir (1974), Stalker (1978), Nostalghia (1983) et Le Sacrifice (1985)
Les quatre films cités de notre étude ne se présentent pas dans l'ordre chronologique de réalisation. En réalité, nous avons commencé la rédaction de la Recherche à l'envers, c'est-à-dire en commençant par Nostalghia. Car il nous a semblé que de cette manière nous arriverions à mieux appréhender et saisir les figures et les objets significatifs dans l'œuvre d'Andreï Tarkovski. C'est une rétro-vision filmographique qui nous permet, en ce qui nous concerne, d'une part, de comprendre les aspects dominants et originels de son œuvre, et d'autre part, d'asseoir nos hypothèses cinémantiques.
Par ailleurs, les quatre films cités obéissent en quelque sorte à la remarque de Gilbert Cohen-Séat, à propos de la classification des films.[9] Il propose de classer le contenu des films sous quatre grandes rubriques (...) : "le merveilleux" (qui dépayse brutalement donc agréablement), "le familier" (qui se repaît de "petits faits vrais"…), "l'héroïque" (qui étanche chez le spectateur une générosité sans emploi dans la vie courante), "le dramatique" enfin, qui va droit aux crispations affectives du spectateur…"[10] Nous pensons que les quatre films que nous avons choisis, traduisent, certes, avec parfois des grandes réserves, la quadripartition de Cohen-Séat. En effet, l'apothéose lente et progressive d'Andreï Roublev se classe sous la rubrique du "merveilleux" ; le film auto-biographique, Le Miroir, se range dans "le familier" ; Stalker peut être inclut dans "le dramatique" et enfin Nostalghia dans "l'héroïque".
Enfin, la thèse se divise sur trois sections, trois tomes d'une taille inégale. Dans le premier tome : "Hypothèses et structures cinémantiques", nous avons introduit des approches successives sur l'ensemble des notions sur lesquelles nous allons nous appuyer ; ensuite nous effectuons une mise au point de notre méthode de travail ; enfin nous aborderons, au fur et à mesure de leurs "apparitions", des faits significatifs de trois films d'Andreï Tarkovski : dans Nostalghia ou "La contagion héroïque", nous aborderons des aspects d'une topologie cinémantique ; dans Stalker ou "Le drame d'être", nous développerons d'autres syndromes et symptômes cinémantiques et enfin dans Le Miroir ou "Etat critique ; critique d'état", nous nous attacherons à des aspects cinémantiques qui concernent la famille, le quotidien et la guerre. Dans les films cités, nous abordons presque uniquement des plans spécifiques, en général de très courte durée : une plume qui tombe, une personne qui trébuche, des gros plans d'objets, etc. En bref, des moments fugaces et rapides. L'élaboration de l'étude s'articule en partant de l'action d'un détail d'un plan sur l'ensemble du film. Ce qui nous a conduit à un constat : "pour saisir la profondeur singulière et unique d'un film, nous devons le consulter "plan par plan". C'est ce constat qui nous a conduit à consacrer un tome entier à un seul film : Andreï Roublev. C'est le second tome : "Résultats et postulats cinémantiques". Mais ce constat à son tour nous conduit à un autre fait particulièrement problématique : est-ce qu'il suffit qu'il y ait un seul "plan cinémantique", pour que tout le film acquière un statut cinémantique ? Ce qui implique un élargissement considérable de la question cinémantique, vers des horizons à découvrir. Le troisième tome, nous venons de le dire, est consacré à une esquisse d'un "dictionnaire des figures cinémantiques", dans lequel nous montrons d'une part, la singularité foncière d'un "objet cinémantique", et d'autre part, le fait que l'interprétation cinémantique ne s'applique qu'au cas par cas, toujours à partir d'une image en mouvement. Cela implique en définitive que la cinémancie s'intéresse aux plans "exceptionnels".
Notes et références
- ↑ Il avait aussi un oncle poète : (...) "Valentin Tarkovski (1900 – 1918) partisan de l'anarchiste ukrainien Makhno, ainsi que ses deux grands-parents : Maria Danilovna (1870 – 1943) et Alexandre Tarkovski (1860 – 1920) poète, proche du mouvement "Narodnaïa Volia." Andreï Tarkovski, Journal 1970 – 1986, op. cit., p.463. Il en est également de même pour toutes les citations dans le texte sur la famille d'Andreï Tarkovski.
- ↑ Cf. Larissa Tarkovski, Andreï Tarkovski, Editions Calman-Lévy, 1998, p.36.
- ↑ Andreï Tarkovski, Cahier Journal 1970-1986, op. cit., p. 463.
- ↑ Certes cette notion prête à confusion, mais nous pouvons la comparer à la perfection stylistique de la calligraphie orientale, et par prolongement à la calligraphie extrême-orientale et à sa poésie, comme par exemple l'importance de la poésie haïku dans ses écrits.
- ↑ Cf. Larissa Tarkovski, op. cit., pp. 40-41.
- ↑ Institut d'Etat du Cinéma
- ↑ Mikhaël Romm (1901-1971) : (...) "Réalisateur russe parmi les plus importants de sa génération; entre autre films, Boule de suif, Lénine en octobre, Le Fascisme ordinaire, Et pourtant je crois. Il enseigna la réalisation au VGIK, et eut pour étudiants, (Outre Andreï Tarkovski) Tchoukraï, Danelia, Choukchine, Iossellani, sur lesquels il exerça une grande influence." (Cf. Cahier Journal, p.448.)
- ↑ Cf. Larissa Tarkovski, op. cit., pp. 40-41.
- ↑ Problèmes actuels du cinéma et de l'information visuelle, P.U.F., Paris, 2 volumes, pp. 35 à 43 du volume 2, "Le contenu des films".
- ↑ Citée par C. Metz, tome 1, op. cit., p. 233.