Visiteur (Le)

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Visiteur (Le) (Muukalainen) , premier plan du film.

Aspects techniques du film

  • Visiteur (Le) : Année de réalisation : 2008, diffusion 08 décembre 2008 (Estonie)
  • Titre original : Muukalainen (Finlande), Der Besucher (Allemagne), The Visitor (Titre international anglais)
  • Réalisation : Jukka-Pekka Valkeapää
  • Pays : Finlande, Estonie, Allemagne, UK. 98 minutes, couleur
  • Nombre de plans (ici, "plan" désigne,"tout morceau de film compris entre deux changements de. plan) : 589
  • En moyenne : 1 plan/10.02 secondes.
  • Langue : Finlandais
  • Production : Helsinki Filmi Oy, Backup Films, Blue Light, Exitfilm, Propeller Film
  • Directeur de Production : Kokkonen Jabnina, Remus Niko
  • Scénario : Forsström Jan et Jukka-Pekka Valkeapää
  • Images : Hutri Tuomo
  • Décors (scénographie) :
  • Costumes : Suominen Sari
  • Son : Nyström Micke
  • Musique originale : Tulve Helena
  • Montage : Junkkonen Mervi
    • Principaux acteurs :
  • L'Enfant : Vitali Bobrov
  • Le Père : Tommila Jorma
  • La Mère : Ikäheimo Emilia
  • Le Visiteur : Pavel Liska
  • L'Homme au costume : Poranen Pauli
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Résumé du film

Il était une fois, un enfant qui vivait avec sa mère dans le cœur d'une forêt, dans le grand nord, son père était en prison. L'enfant était muet, il avait comme seul compagnon un cheval blanc qui s'approchait peu de lui, le cheval était toujours caché au fond de l'étable. L'enfant et le père avaient un secret, il s'agit d'un petit objet mystérieux que l'enfant caché soigneusement dans un double fond d'une petite boîte métallique en forme de coffre. Avant de rendre visite à son père, l'enfant cherchait l'objet mystérieux dans un puits abandonné, au fond de la forêt. Un jour, un visiteur (mystérieux) apparaît, avec un billet du père, afin de rester un moment avec la mère et l'enfant.

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Introduction : Le Visiteur - Un conte de "de-main"

«  On a supposé à tort qu'une vie

trop riche en imagination nous
empêcher de venir à bout de la réalité.
Mais c'est le contraire qui est vrai. »

Bruno Bettelheim, p. 186.
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Après avoir consulté quelques pages d'Internet sur le jeune réalisateur finlandais Jukka-Pekka Valkeapää (né en 1977), nous retenons deux faits importants : 1. Valkeapää définit son film comme étant « un conte de fée d'une mystérieuse obscurité, dit du point de vue de l'enfant… » (Article de Karri Kokko) ; 2. Valkeapää a révélé que l'allure générale du film lui a été inspirée par le travail du peintre américain Andrew Wyeth (1917-2009). (Article de Natacha Senjanovic)


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La question du conte

Les valeurs des contes de fées d'après Bettelheim

Bruno Bettelheim (1903-1990), était un éducateur, thérapeute et psychanalyste d'enfants gravement perturbés. Il écrira un livre, paru en 1976, d'abord en anglais, The Uses of Enchantment, traduit en suite en français sous le titre Psychanalyse des contes de fées. [1]


Dès l'Introduction, Bettelheim met l'accent sur la première valeur des contes de fées, c'est, « lutter pour donner un sens à la vie » (p.15). Mais, il précise que pour enrichir la vie d'un enfant, « il faut qu'une histoire stimule l'imagination » (p.17). Ces histoires qui abordent des problèmes universels, « s'adressent à leur « moi » en herbe et favorisent son développement (p.19). De la sorte, la valeur inégalée du conte de fées est qu'il « ouvre de nouvelles dimensions à l'imaginaire » (p. 21). Le message que les contes de fées délivrent à l'enfant est que « la lutte contre les graves difficultés de la vie est inévitable et fait partie de l'existence humaine » (p.22).

Nous pouvons constater la place prépondérante de l'imagination dans la pensée de Bettelheim, qui constitue en fait, la première des deux grandes parties qui forment son livre :

  • 1ère partie : « De l'utilité de l'imagination » (197 pages) ;
  • 2nde partie : « Au royaume des fées » (162 pages).

Afin de saisir la richesse et la profondeur de la pensée du psychothérapeute, il est utile de faire quelques rappels sur les éléments de base de la psychanalyse :

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La théorie de l'appareil psychique : Le « ça » le « moi » et le « surmoi »

Le « ça » le « moi » et le « surmoi », qui ont fini par passer dans le langage courant, sont à l'origine des concepts élaborés par Freud, J. Laplanche et J.B. Pontalès. Ils en donnent les définitions suivantes dans leur Vocabulaire de la psychanalyse (P.U.F. 5e Edition, 1976, pp. 56, 184, 241, 471), [2]

Nous retenons seulement un extrait du résumé de chaque rubrique :

  • 1. Le « ÇA » constitue le pôle pulsionnel de la personnalité ; ses contenus, expression psychique des pulsions, sont inconscients. Il est le réservoir premier de l'énergie psychique. Il entre en conflit entre le moi et le surmoi. Le « Ça » est souvent décrit dans les contes de fées sous la forme d'une bête, qui représente notre nature animale. [3]
  • 2. Le « MOI » est dans une relation de dépendance tant à l'endroit des revendications du « ÇA » que des impératifs du « SURMOI » et des exigences de la réalité. Il se pose en médiateur. Il représente dans le conflit névrotique le pôle défensif de la personnalité.
  • 3. Le « SURMOI » (ou « SUR-MOI »), son rôle est assimilable à celui d'un juge ou d'un censeur à l'égard du « MOI ». Il est défini comme l'héritier du complexe d'Œdipe ; il se constitue par intériorisation des exigences et des interdits parentaux.
  • 4. L'« IDEAL DU MOI » : instance de la personnalité résultant de la convergence du narcissisme (idéalisation du moi) et des identifications aux parents, à leurs substituts et aux idéaux collectifs. Il constitue un monde auquel le sujet cherche à se conformer.

Soulignons que dans Le Visiteur, le « complexe d'Œdipe » a une place centrale. En effet, le « mythe d'Œdipe » [4] est « devenu l'image qui nous permet de comprendre les problèmes (…) que nous posent les sentiments complexes et ambivalents que nous éprouvons vis-à-vis de nos parents ».[5] Le « complexe d'Œdipe » est le problème le plus important de l'enfance ».[6]


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Les éléments les plus stables des contes de fées

Tolkien précise que les éléments sont au nombre de quatre : « l'imagination, la guérison, la délivrance et le réconfort. Guérison d'un profond désespoir, délivrance d'un grand danger et , par-dessus tout, le réconfort ».[7] Toutefois, Bettelheim ajoute un 5ème élément ; une menace dirigée contre l'existence physique du héros.[8]


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Un tableau d'Andrew Wyeth

Christina's World

 
Image-Peinture, Andrew Wyeth (1917 - 2009), Christina's World, 1948.


Christina's World (Le Monde de Christina), résume en partie, l'ambiance du film et pose le décor dans lequel évolue le triangle formé par l'Enfant (sans nom - qu'on appellera désormais, l'Enfant), la Mère et le Visiteur. Toutefois, il faut distinguer une grande différence, le paysage du film est verdoyant et luxuriant.

Par ailleurs, le corps contorsionné, bouleversé, tendu de Christina, rejoint à un moment, celle de la Mère qui boîte. Ses mains sont digne d'intérêt, la main gauche est ouverte, elle pointe vers la maison, et la main droite est fermée, comme si elle cachait un petit objet.…

Le personnage est vu de dos, comme le sera souvent l'Enfant dans le film, et qui est une innovation dans le cadrage des protagonistes. Nous rencontrons souvent cette attitude chez le peintre romantique allemand Caspar David Friedrich (1775 - 1842), notamment dans Le Voyageur contemplant une mer de nuages (1819), Femme dans le soleil du matin (1818), ou encore Le moine au bord de la mer (1808).

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Autre innovation majeure du film : « les barrages accumulés »

Cette seconde innovation concerne toujours le cadrage des protagonistes, sauf qu'une partie, parfois assez importante de l'écran est occultée par un fond sombre, parfois c'est une porte (plan 16), les planches d'une étable (plan 134b) ou encore un trou dans le plancher (plan 41).

Cette caractéristique participe pleinement dans l'aspect mystérieux du « conte ». Nous rencontrons cette qualité de réduction dans la peinture, comme par exemple, entre autres, dans un tableau de Johannes Vermeer (1632 - 1675), La Liseuse à la fenêtre (1659).

 
Image-Peinture. Johannes Vermeer (1632 - 1675), La Liseuse à la fenêtre, 1659, Dresde.


En effet, nous constatons qu'au premier plan, le rideau jaune à gauche, accroché à une fine tringle de cuivre, cache une partie verticale du tableau, et que la table avec son épais tapis rouge à motifs cache une partie horizontale. Ce qui conduit et oriente nos regards presque exclusivement à la Liseuse. Ainsi, cet astucieux dispositif installe à la fois, une distance entre le spectateur et l'unique protagoniste, et en même temps, isole la personne. Par ailleurs, ces effets plastiques rejoignent la thématique du tableau : la lecture d'une lettre intime, qui a à la fois, la légèreté du rideau jaune et l'épaisseur du tapis rouge.

Dans son article La Lettre insaisissable, Alain Jaubert parle, avec raison, de « barrages accumulés (…) pour renforcer l'idée d'inaccessibilité ». [9]

Valkeapää utilisera, comme nous allons le voir, avec une grande finesse le système des « barrages accumulés », comme par exemple, entre autres les plans d'ouverture, plans 2 et 8. Ils participeront pleinement dans l'émergence d'un sens qui reste impénétrable, car avec ce film, le réalisateur pousse, pour ne pas dire, propulse, le sens d'un film vers une nouvelle dimension, qui à notre connaissance, n'a pas encore été franchi. Ce qui rend le film, Le Visiteur, particulièrement passionnant et captivant.

(30 décembre 2011)

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Photogrammes du film - Analyse et liens spécifiques du film

Visiteur (Le), de Valkeapää Jukka-Pekka (2008)

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La suite est en préparation...


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Notes et références

  1. Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, Éditions Robert Laffont, traduit de l'américain par Théo Carlier, 1976.
  2. Cf. également, B. Bettelheim, op. cit., p. 19.
  3. Ibid. p. 121.
  4. "Dans le mythe grec, Œdipe devient roi en tuant son père et en épousant sa mère, après avoir résolu l'énigme du Sphynx qui, aussitôt, se donne la mort. L'énigme consistait à deviner les trois âges de l'homme." Ibid. p. 199.
  5. Ibid. p. 43.
  6. Ibid. p. 64.
  7. Ibid. p. 219.
  8. Ibid. p. 220.
  9. Lumière de l'image, Gallimard, 2008, pp. 109-119.