Homme (Figures de l’)
Titres des films
Mode d'emploi de la figure (mot) et abréviations
Titre | Titre original | Réalisation | Scénario | Année | Pays | Durée (min.) |
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12 Hommes en Colère | 12 Angry Men | Lumet Sidney | Rose R. | 1957 | USA | 95 |
Dernier des Hommes (Le) | Der letzte Mann | Murnau F. W. | Mayer C. | 1924 | Allemagne | 90 |
Homme dans la Foule (Un) | A Face in the Crowd | Kazan Elia | Schulberg B. | 1957 | USA | 125 |
Homme nommé Cheval (Un) | A Man Called Horse | Silverstein Elliot | Witt J. | 1970 | USA | 115 |
Homme qui vendit son âme (L’) | Homme qui vendit son âme (L’) | Paulin Jean-Paul | Méré Charles, Paulin Jean-Paul | 1943 | France | 99 |
Vieil Homme et La Mer (Le) | The Old Man and the Sea | Sturges John | Viertel P. Hemingway E. |
1958 | USA | 89 |
Autres titres de films
Titre | Titre original | Réalisation | Scénario | Année | Pays | Durée |
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Andreï Roublev §. "L'homme-insecte". |
(Voir détail : Andreï Rublyov) | Tarkovski Andreï | Tarkovski A. Konchalovsky A. |
1969 | URSS | 215 |
Maître (Le) §. La valeur du prologue : Hypothèse qu'un protagoniste représente métaphoriquement un pays |
(Voir détail : Mistrz) | Piotr Trzaskalski | Lepianka W. Trzaskalski P ; |
2005 | Allemagne Pologne |
117 |
Miroir (Le) | (Voir détail : Zerkalo) | Tarkovski Andreï | Tarkovski A. Micharine A. |
1975 | URSS | 106 |
Pardonnez-moi | Pardonnez-moi | Maïwenn | Maïwenn | 2006 | France | 86 |
Pledge (The) §. "L'homme-pêcheur" |
Pledge (The) | Penn Sean | Kromolowski Jerzy, Olson-Kromolowski Mary | 2001 | USA | 124 |
Photogrammes extraits des films - Analyse et liens spécifiques des films
Le Miroir, d'Andreï Tarkovski
La métamorphose du « passant-médecin »
Plan 8 : 06' 28" : Maroussia est assise sur la clôture.
Plan 9 : 06' 41" : En contre champ, et du fond de l'arrière plan, nous commençons à distinguer un point noir qui ne cesse de grossir : c'est un homme sombrement habillé, comme si celui-ci allait annoncer une situation sombre. Il s'approche de Maroussia, et il lui demande la route de Tomchino. Elle lui répond qu'il fallait tourner "avant le buisson." Mais le passant, reste à regarder Maroussia, et engage la conversation. Il lui demande une cigarette.
Plan 11 : 08' 12" : L'homme jette sa trousse et veut s'asseoir sur la clôture, sans aucune gêne, près de Maroussia. Tout à coup, la clôture cède sous leur poids, et elle se casse, dans un bruit sec. Tous les deux se retrouvent au sol. Aussitôt la jeune femme se lève, visiblement embarrassée. L'homme éclate de rire et reste couché aux pieds de la femme.
Nous pouvons supposer que la scène de la clôture qui se casse sous le poids conjugué de Maroussia et du médecin-passant, comme étant une situation de consommation d'un acte transgresseur. Les barrières s'effondrent. Il y a désordre dans la limite des normes établies.
Les scènes suivantes se succèdent et elles ont aussi un lien avec l'inconnu (Voir : Chat noir et verre de lampe à pétrole.
Regardons le contexte particulier du chat noir dans le plan 17. Il est accroupi au milieu de la table à manger. Il lape du lait qui s'est renversé sur la table sans que l'on sache comment. Aliocha, enfant, lui verse sur la tête la poudre blanche. Cette image subit une déviation sémantique. En effet, le chat noir, sombre, est inclus dans un décor sombre. Il devient comme un lien du passage du monde animé au monde inanimé : "une animalité substantialisée". Par un enchantement presque féerique, il y a une métamorphose de l'inconnu-médecin en chat-amant, qui lape le lait renversé sur la table : comme une maternité renversée, une maternité métamorphosée à son tour.[1]Soulignons aussi qu'au plan 19, au moment où tombe le verre de la lampe à pétrole, nous distinguons le chat noir, confondu avec l'obscurité, à peine perceptible, accroupi au coin du banc.
En ce qui concerne le verre de la lampe à pétrole, ne s'agit-il pas d'un signe sexuel ? Un signe hermaphrodite ? D'abord par sa forme : un long tube en verre renflé dans sa partie supérieure. C'est un signe "transparent". Ensuite, il installe une liaison directe avec "Le fenil en feu."
Les combinaisons du signe
En résumé, nous assistons à l'élaboration d'une structure qui s'appuie sur les combinaisons du signe et de sa signification par un "procédé de transfert et de déviation". D'ailleurs, cet épisode semble se présenter comme un second prologue. Mieux encore, par son aspect étrange, il devient un prologue résumant en partie l'ensemble de la diégèse : une femme attend son mari, elle rencontre par hasard un "passant" qui a perdu son chemin. Il lui demande un clou, ensuite une cigarette. Le clou [2] est un indice qui suggère la fixation du destin, la cigarette est l'indice qui insuffle l'étincelle d'une passion amoureuse, mais comme une cigarette, cette passion sera de courte durée, comme "un passant", la passion est passagère. Dès le début l'homme lui dit qu'il est troublé par sa présence. L'homme iconiquement se transforme en chat, il s'intègre dans le cadre familial. Mais un chat noir garde une grande part de mystère. (Voir : Eau, Feu.)
Les déviations de la figure du père et de la mère
Au plan 24 nous faisons connaissance avec le père du héros lors d'une apparition brève qui nous le montre en train de verser de l'eau sur la tête de son épouse. (Cf. Photogramme - Père.)
Ici, "le père" semble être à la fois, et contradictoirement, "le père du héros", et "le père de la patrie". Qu'est-ce à dire ? Andreï Tarkovski donne en fait une double fonction à la figure du père : d'abord par sa très courte apparition, et, ensuite, par les données que nous fournit la suite de la séquence (qui ne trompe pas), particulièrement dans la scène des cheveux qui cachent le visage de Maroussia. (Cf. Photogramme - Mère)
Cette scène suggère une personne sans visage avec une connotation nettement politique, surtout dans la séquence qui propose la scène de la danse où les gestes rappellent ceux d'une marionnette articulée. La déviation de cette figure illustre d'une manière frappante, "la mainmise" du pouvoir politique et autoritaire, "la main du père de la patrie", qui manipule les personnes comme des marionnettes, jusqu'à les transformer en personnes sans visages, sans âmes, c'est donc une illustration de "l'anéantissement humain". En effet, ici, le bain acquiert une signification de soumission.
Déviations et conséquences
A partir du plan 77, commence une série de 18 plans en noir et blanc sur la guerre espagnole. [3] Les images illustrent en silence le martyr du peuple espagnol : avions, fumées, verres cassés, des objets qui montrent l'horreur de la guerre. Cette série est suivie par 7 plans : Des images sur l'histoire de l'aérospatiale russe [4] avec d'énormes montgolfières. Nous remarquons qu'en ce qui concerne la série espagnole, la plupart des plans, pour ne pas dire la majorité, hormis deux, proposent soit des femmes, soit des enfants. Une première constatation s'impose : les hommes ne sont pas là, car ils font la guerre. Paradoxalement, Andreï Tarkovski ne choisit pas de mettre, comme la logique le voudrait, des plans de guerre. [5] Mais il montre des hommes qui en fait, au sens littéral du terme, "jouent avec des ballons". Ce qui semble expliciter l'enchaînements des deux séries, pour aboutir finalement sur un plan de documentaire isolé : Une rue enthousiaste, pleine de joie, comme si la guerre était finie.
Très subtilement et avec une maîtrise dans le montage, Andreï Tarkovski nous montre l'horreur et "la débilité" des hommes qui font la guerre. Comme dans "Le Rêve d'Aliocha" où il y a une double déviation entre "le père de l'héros" et "le père de la patrie". Dans cet épisode, une première déviation est proposée par "l'espagnol imitant le matador", et par la gifle qu'il lance à la jeune danseuse : l'homme avait donc le droit d'incarner sa culture, mais il refuse ce même droit à la fille qui a mal appris. Ainsi jusqu'à présent, en six épisodes et en comparaison avec la figure de la femme, Andreï Tarkovski propose quatre figures générales de l'homme : "l'homme-amant" (plans 9 et 11), "l'homme-père-absent" (plan 24),"l'homme-chef-observateur" (le sphinx) (plans 38 et 41)," l'homme-réfugié-instructeur" (plans 59-73). De plus, l'apparition de ces figures est très courte, elles s'opposent aux figures féminines, d'une longue durée. L'aspect de "l'homme-réfugié-instructeur" est intéressant, car d'une part, par ses moustaches, il présente un dénominateur commun avec Staline, "le père tyrannique de la patrie", d'autre part, par sa passion tauromachique et l'éventail gestuel inhérent à sa passion, il incarne le type même du centaure, "l'homme animal". Il ne maîtrise pas ses émotions ou du moins, il laisse éclater son émotion : "tant de temps pour t'apprendre", dit-il à la jeune femme. Ainsi, ces faits juxtaposés et intercalés selon l'ordre qu'on vient de voir, suggèrent toujours par déviation l'état contemporain de l'union soviétique, que le cinéaste ne pouvait évoquer qu'indirectement. Le détour espagnol marque d'abord le passage du particulier au général : l'histoire d'une famille soviétique déchirée par rapport à une famille espagnole. D'autre part, le détour espagnol propose la position soviétique vis-à-vis de "La question espagnole". Il y a aussi une condamnation sans appel du communisme, qui n'est pas comme le prétend "le parti", un intérêt porté à l'humain en général, mais bien un intérêt porté au particulier, à l'unique. Témoin en est, le plan 77b, 20 : "l'homme souriant", assis seul au bout d'une montgolfière. (Cf. Photogramme – Ballon.)
Ce plan ne montre pas le collectif. Ainsi, par détournement, nous comprenons les propos du cinéaste quand il dit que le film doit "tenir debout". Ici se révèle l'art du montage visuel, puisque la bande son est réduite à quelques bruits d'explosions dans la 1ère série, et à la musique de Pergolèse (le Stabat Mater) dans la seconde série. La proposition générale bout à bout est une espèce d'ellipse, dense émotionnellement, qui prépare par ailleurs la suite des événements. L'art cinématographique de Tarkovski fonctionne rarement au 1er degré. [6] Ce qu'il "montre", n'est pas ce qu'il veut "démontrer". Autrement dit, l'objet, le signe, la chose "visible à l'écran", n'est pas ce qu'elle "est". Elle procède par stratification successive, qui s'engage presque constamment sur des éléments disparates, parfois sans liaison a priori avec l'élément proprement dit. C'est certainement pour cette raison que le cinéma de Tarkovski nous touche si profondément, car il laboure nos champs intérieurs, avec des sillons créateurs qui font germer des fruits d'une saveur spéciale.
Liens Spécifiques du film
Voir : Miroir (Le)
Voir aussi
Notes et références
- ↑ Comme aussi par exemple dans Les Chevaux de feu de Sergeï Paradjanov, le lait dans ce film a été renversé d'un seau sur une terre boueuse : l'amant était un sorcier. Dans Viridiana de Luis Buñuel le lait représente "la générosité de Don Jaime", notamment le plan où la petite fille de la gouvernante verse le lait sur la tête de la vache.
- ↑ Cf. Jacques Siclier, Ingmar Bergman, Editions Universitaires, Paris, 1960, p. 151.
- ↑ Signalons que les plans non tournés par Andreï Tarkovski, mais montés par ses soins, que ça soit un seul documentaire ou une série, sont considérés dans l'évolution de notre découpage du film comme un seul plan ayant alors selon le cas, des dérivations de plans en fonction des documentaires.
- ↑ Sans doute, pour satisfaire les exigences des autorités.
- ↑ Il n'intercale deux séries de documentaires sur la guerre, dont la traversée du lac de Sivas, qu'au plan 110 du film.
- ↑ Mais l'exception confirme la règle, cette fois-ci l'enchaînement des deux séries demande justement une première lecture au 1er degré, toutefois pas pour longtemps, car il faut dire qu'à une 2nde lecture le sens est considérablement altéré.